Le nouveau visage d’une Afrique émancipée en 2025

Des institutions régionales devenues des lieux de pouvoir, des guerres civiles ignorées comme au Soudan ou en Centrafrique, des échéances électorales décisives en Afrique de lOuest, des fins de rêgne incertaines en Afrique cenrale (Cameroun, Congo Brazzaville…), des interrogations sur la place  des occidentaux ou encore la crainte d’une progression des groupes djihadistes marqueront en 2025 la vie politique en Afrique.
 
À Mondafrique, nous sommes particulièrement heureux d’accueillir au sein de notre rédaction Seidik Abba, journaliste expérimenté et expert incontesté du continent africain, qui devient le rédacteur en chef du site. Nous publions ci dessous son premier papier.
 
 
 
  • Union africaine: Moussa Faki exit !!!

 
Après deux mandats de quatre ans, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, élu en janvier 2017, va céder en février 2025 son fauteuil de président de la Commission de l’Union africaine à son successeur. Celui-ci sera désigné lors du sommet ordinaire des Chefs d’Etat de l’organisation panafricaine qui se tient habituellement en février dans la capitale éthiopienne, siège de l’UA depuis 1963. En vertu de la nouvelle règle de rotation par région à la tête de la Commission, c’est l’ancien Premier ministre kenyan Raila Odinga qui tient la corde pour succéder à Moussa Faki, au titre de l’Afrique de l’Est.
 
Outre la présidence de la Commission, on suivra avec beaucoup d’intérêt la désignation du titulaire du poste très sensible de Commissaire en charge de la Paix et de la sécurité ainsi que l’élection du nouveau vice-président de la Commission. La désignation du nouveau président de la Commission, de son vice-président et des commissaires promet d’être tout aussi agitée que lors des précédentes années électorales de l’UA.
  • La Banque africaine de développement convoitée

Au terme de ses deux mandats de cinq ans, le Nigérian Akinwumi Adesina, élu en 2015, remettra en mai prochain les clés de la Banque africaine de développement (BAD) à son successeur. En effet, le nouveau président de la Banque africaine de développement sera désigné en mai 2025 lors des Assemblées annuelles de l’institution financière panafricaine qui auront lieu à Abidjan en Côte d’Ivoire, pays qui abrite son siège depuis 1964. Pas moins d’une dizaine de candidats issus de toutes les cinq régions du continent sont en lice pour succéder à M. Adesina lors du scrutin qui  promet d’être serré et incertain.
  • La CEDEAO en quête de légitimité

 
Le Burkina Faso, le Mali et le Niger cesseront d’être membres de la Commission économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) le 29 janvier 2025. Une session ministérielle extraordinaire de l’organisation sous-régionale sera convoquée au premier trimestre de la nouvelle année pour définir les modalités pratiques de la séparation entre les trois pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) et la CEDEAO. Les discussions porteront sur le sort des ressortissants de ces trois pays qui travaillent au siège de la CEDEAO et dans ses institutions spécialisées établies dans certains de ses 15 pays membres. Elles porteront également sur les bureaux de représentation de la CEDEAO au Burkina Faso, au Mali et au Niger.
 
  •  Trump, une incertaine idée de l’Afrique

 
 
Le retour de Donal Trump à la maison blanche le 20 janvier 2025 sera suivi avec la plus grande attention en Afrique où les Etats-Unis comptent au moins deux programmes phares: le Millenium Challenge Corporation (MCC) et l’African Growth Opportunity (AGOA).
 
Les Etats-Unis sont par ailleurs le plus grand bailleur de fonds des opérations de maintien de la paix des Nations unies. Deux de ces opérations sont actuellement déployées en Centrafrique (MINUSCA) et en République démocratique du Congo (MONUSCO).
 
L’autre raison pour l’Afrique de surveiller le retour de Trump au pouvoir, c’est l’engagement des Etats-Unis dans la lutte contre le terrorisme. Par le passé, Washington a apporté une aide précieuse aux pays africains confrontés à la menace terroriste en formation d’unités spécialisées et en équipement.
  • Soudan, une guerre civile sans fin

 
Après deux années effroyables marquées par des dizaines des milliers de morts et des blessés ainsi que des millions de déplacés, la guerre entre les forces armées soudanaises du général Abdel Fattah al-Burhan et les forces de soutien rapide (FSR) du général Hamdan Daglo dit Hameti, devrait entrer dans sa phase décisive en 2025. Soit une solution politique est imposée aux deux belligérants par la communauté internationale surtout avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, soit un des deux belligérants l’emporte militairement. Sur le terrain, un rapport de force plus favorable à l’armée soudanaise semble se dessiner. Mais la solution à la guerre civile au Soudan se trouve non pas entre les mains des protagonistes soudanais mais auprès de leurs parrains extérieurs qui continuent de financier l’effort de guerre.
  • Sahel, des transitions militaires hésitantes

Manifestation pour demander le départ de la France le 20 août à Niamey
 
Depuis les coups d’Etat d’août 2020 et de mai 2021 au Mali ; de janvier 2022 et de septembre 2022 au Burkina Faso ; de juillet 2023 au Niger, ces trois pays ouest-africains connaissent des transitions militaires sans que l’on sache véritablement quel est l’agenda des militaires au retour à l’ordre constitutionnel normal. A en juger par l’inscription d’une ligne consacrée à l’organisation des élections dans le budget 2025, le Mali pourrait être le premier des trois Etats à s’engager dans la voie du retour à l’ordre constitutionnel avec la tenue de plusieurs scrutins au cours de la nouvelle année. A défaut d’élections, le Niger pourrait organiser des Assises nationales promises depuis des lustres par le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP) au pouvoir à Niamey.  Au Burkina Faso, les choses ne souffrent d’aucune ambiguïté, le capitaine Ibrahim Traoré dit IB, ayant fait en 2024 prolonger la transition militaire de cinq ans.
  • Côte d’Ivoire, une présidentielle ouverte 

 
Dans le contexte actuel si particulier en Afrique de l’Ouest marqué par la crise sécuritaire, les tensions la CEDEAO et l’AES ainsi que l’instabilité politique illustrée par la répétition des coups d’Etats militaires, l’élection présidentielle prévue en octobre 2025 en Côte d’Ivoire présente des enjeux qui dépassent largement le pays. Si la candidature du président Alassane Ouattara à sa succession ne semble plus faire des doutes, en revanche des incertitudes persistent sur le sort de son prédécesseur Laurent Gbagbo, déterminé à se présenter au scrutin en dépit d’une condamnation judiciaire devenue définitive. Echaudés par les troubles post-électoraux de 2010-2011, qui ont fait des centaines de dizaines de morts, les Ivoiriens appréhendent la tenue de la présidentielle de 2025.
 
  • Togo, un régime politique changeant

 
En vertu de la nouvelle Constitution adoptée en avril 2024, le Togo devrait passer en 2025 du régime présidentiel actuel au régime parlementaire en 2025. La réforme, qui verra le président du Conseil des ministres devenir le pivot des institutions à la place du président de la république, devrait entrer en vigueur au plus tard en mai 2025.
 
Selon ses promoteurs, la réforme constitutionnelle apportera de la stabilité politique au Togo, pays au cœur d’une Afrique de l’Ouest confrontée au défi sécurité et aux coups d’Etat militaires.