La terrible dépendance de l’économie algérienne aux hydro carbures

Les cours du pétrole sont ont été légèrement plombés par les déclarations de Donald Trump lors d’une allocution en ligne devant un parterre de grands patrons à l’occasion du Forum économique mondial de Davos invitant l’Arabie saoudite et l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) à faire baisser les prix. Or, l’Algérie subit une forte dépendance aux fluctuations du prix des hydrocarbures au niveau mondial. Si les décisions du président Trump se concrétisent, le  baril se fixera entre 50/60 dollars, alors que d’après le FMI, l’équilibre budgétaire algérien nécessite un baril entre 130/140 dollars. Seul resterait à la planche à billets qui conduirait à une inflation à deux chiffres.

Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités, expert international, docteur d’Etat  

ademmebtoul@gmail.com

Cette  dépendance vis-à-vis des hydrocarbures  a cinq impacts sur les équilibres macro- économiques

Le premier impact est  l’accroissement du déficit budgétaire

C’est une loi universelle valable pour tous les pays, contribue à accélérer le processus inflationniste. Pour la loi de 2024, le budget de l’Etat avait prévu toujours au cours de 135 dinars un dollar des dépenses de 113,15 milliards de dollars et des recettes de 67,44 milliards de dollars , soit un déficit budgétaire d’environ 45,71 milliards de dollars. La loi de finances prévisionnelle 2025, , les dépenses budgétaires prévues pour 2025 s’élèvent 127,40 milliards de dollars, une hausse de 9,9 % par rapport à 2024, les recettes budgétaires de 63,13 milliards de dollars, donnant un déficit budgétaire de 64,27 milliards de dollars . Pour l‘Algérie, la loi de finances 2025 comme celle de 2024, élaborée sur la base d’un prix de référence fiscal du baril de pétrole à 60 dollars et d’un prix de marché à 70 dollar étant un artifice comptable, pour assurer son équilibre budgétaire, l’économie algérienne a besoin d’un cours du baril de plus de 140 dollars pour la loi de finances 2023 et plus de 150 pour celle de 2024/2025 contre 110 pour celles de 2021/2022.

Le second  impact concerne le niveau des réserves de change

Cette dépréciation du dinar officiel permet d’augmenter artificiellement la fiscalité des hydrocarbures (reconversion des exportations d’hydrocarbures en dinars) et la fiscalité ordinaire (via les importations tant en dollars qu’en euros convertis en dinar dévalué), accentuant l’inflation des produits importés,, matières premières et  biens, montant accentué par la taxe douanière, étant  un impôt indirect, supporté par les ménages.

Le troisième impact est l’ écart entre le cours officiel et le cours du marché parallèle

Soit 30% vers les années 2000, 40% en 2010à 60% en 2020 et en date du 22 janvier 2025 l’écart est de 80,15% ce qui favorise les surfacturations en devises. Après une euphorie passagère, la promesse d’instaurer l’allocation de vises de 750 euros par an et par personne à compter du 1 janvier 2025, s’est perdue dans les sables, les textes d’application n’ayant pas vu le jour.

Le quatrième impact  porte sur le niveau de l’inflation 

Nous avons assisté entre 2021 et 2024 à une augmentation des pénuries qui ont amplifié le taux d’inflation, du fait du manque de planification stratégique afin de préserver le montant des réserves de change qui ne sont qu’un signe monétaire qu’il s’agit de transformer en richesses réelle. Avec une hausse entre 100 et 200% des prix de pièces détachées, voitures et camions et autres produits durables à forte demande facilement stockable, celui qui avait stocké ces produits en Algérie d’une valeur de 300 millions de dollars se retrouve avec une valeur augmentant du double au triple entre 600 et 900 millions de dollars. Pour le FMI après correction des données algériennes tenant compte des prix réels sur le marché de 1970 à fin 2023, la moyenne a été de 8,8% par an et durant cette période le taux d’inflation aurait été de 6969,61% où un bien de consommation qui coûtait 100 dinars en 1970, coûte plus de 7069,01 dinars  en 2023  .

Ce ne sont que des approximations, car l’ONS, organe officiel algérien de la statistique, doit revoir le calcul de l’indice car le besoin est historiquement daté : exemple avoir un ordinateur et se brancher sur internet est un nouveau besoin ignoré dans le calcul de l‘indice fixé vers les années 1960/1970)

Le cinquième impact est le taux de chômage

Pour l’Algérie il faut un taux de croissance, selon les institutions internationales de 8/9% sur plusieurs années pour absorber un flux de demande d’emplois par an entre 350.000/400.000 qui s’ajoute au taux de chômage actuel. Pour le taux de chômage si ‘on prend les informations données par le Ministère du travail de 3 millions d’inscrits pour l’allocation chômage sur une population active d’environ 13 millions , le taux de chômage s’élèverait fin 2024 à 22,22%, le FMI donnant un taux entre 14/15% incluant les emplois notamment dans l’administration.

L’amélioration de la cotation du dinar, la lutte contre l’inflation et le chômage  suppose un accroissement de la production et de la productivité interne, la véritable richesse d’une Nation reposant sur des entreprises compétitives dont le support est la valeur travail et non  une rente éphémère. Le développement durable suppose une croissance forte et un Etat régulateur et non gestionnaire.  

 

 

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