La semaine culturelle africaine : sept temps forts à l’affiche !

Festivals de cinéma, rééditions littéraires marquantes, marchés artisanaux colorés, concerts fusion innovants… la culture africaine et afro-descendante dévoile toute sa vitalité. Notre sélection de la semaine vous invite à explorer la richesse créative du continent et de sa diaspora.

1- Les journées cinématographiques de Carthage : une 35 e édition historique

La 35 e édition des Journées cinématographiques de Carthage (JCC) s’impose comme l’un des événements phares de cette fin d’année. Du 14 au 21 décembre 2024, Tunis devient l’épicentre du cinéma méditerranéen et africain sous la direction avisée du cinéaste tunisien Férid Boughedir. Avec une programmation ambitieuse de 217 films issus de 21 pays, cette édition marque un tournant dans l’histoire du festival.

L’événement se distingue par son choix audacieux de mettre à l’honneur trois nations aux contextes cinématographiques riches et complexes : le Sénégal, la Palestine et la Jordanie. La cérémonie d’ouverture illustre parfaitement cette volonté d’ouverture et de dialogue interculturel avec la projection de deux œuvres marquantes : Upshot de la réalisatrice palestinienne Maha Haj et The Freedom Giver du cinéaste irakien Kays Alzubaydi.

La présence exceptionnelle du cinéma tunisien constitue l’un des faits marquants de cette édition, avec un nombre record de 99 films en compétition. Cette participation massive témoigne de la vitalité de la production cinématographique nationale et de la capacité du festival à jouer son rôle de catalyseur pour l’industrie locale.

Les organisateurs ont également fait preuve d’innovation en introduisant plusieurs nouvelles sections qui enrichissent considérablement la programmation. La création d’une compétition nationale dédiée aux productions tunisiennes offre une plateforme inédite pour mettre en valeur les talents locaux. La section « Panorama 35 » apporte une solution élégante aux contraintes rencontrées en 2023 en permettant la projection des films initialement programmés cette année-là. L’introduction de « Carthage Extended » marque l’entrée du festival dans l’ère numérique en explorant les possibilités offertes par l’art immersif et la réalité virtuelle.

2- La 11e édition du marché de Noël africain à Paris

Le 14 décembre 2024 marque le retour attendu du Marché de Noël africain pour sa 11 e édition à Paris. Cet événement, qui se déroule à la Maison des Associations de Solidarité dans le 13 e arrondissement, s’est imposé comme une vitrine essentielle de la créativité africaine en France. L’espace de 700 m² mis à disposition permet une présentation exhaustive des talents du continent africain et de sa diaspora, accueillant plus de 60 exposants.

Depuis sa création en 2011, ce marché est devenu bien plus qu’un simple événement commercial : il représente une véritable plateforme de promotion des cultures africaines et afro-descendantes, tout en créant des opportunités économiques concrètes pour les créateurs. La diversité des produits proposés reflète la richesse culturelle du continent : prêt-à-porter wax, bijoux, accessoires et décoration côtoient la littérature africaine et les produits de beauté naturels. Une exposition d’œuvres picturales complète cette offre variée.

L’accessibilité du lieu, situé à proximité de la Bibliothèque François Mitterrand et desservi par les métros 7 et 14 et le RER C, facilite la venue d’un public varié de 10 h à 21 h. Cette localisation stratégique permet de toucher aussi bien les habitués que les curieux, favorisant les échanges culturels et les découvertes.

Le marché ne se limite pas à l’exposition et à la vente. Des défilés de mode mettent en valeur les créations des exposants, tandis que des performances musicales live avec des artistes africains et afro-descendants rythment la journée. Pour les plus jeunes, des séances de contes et lectures axées sur les traditions africaines sont organisées, ainsi que des ateliers pour tous les âges. Les visiteurs peuvent également assister à des démonstrations de techniques artisanales traditionnelles.

Un espace de restauration propose un véritable parcours culinaire africain, avec des spécialités de différentes régions du continent, ainsi que des dégustations de thés et cafés africains. L’entrée est libre et gratuite, et l’événement est entièrement accessible aux personnes à mobilité réduite.

Organisé en partenariat avec l’association culturelle « A Nous La Culture » et l’agence événementielle Lion Prod Events, le Marché de Noël Africain offre une expérience immersive dans la culture africaine et afro-descendante.

3- Symphonic Gospel à Lyon : une fusion des genres

Le 15 décembre 2024, la Bourse du Travail de Lyon accueille un événement musical d’exception : le Symphonic Gospel. Cette performance unique, organisée dans le cadre du Festival Absolute Gospel, propose une fusion audacieuse entre le gospel afro-américain traditionnel et la musique orchestrale symphonique.   Au cœur de ce spectacle se trouve le Lyon Gospel Mass Choir, dirigé par le duo talentueux formé par Sabine et Vincent Gaillard. Ce chœur, qui rassemble 60 choristes, s’est imposé comme l’une des formations les plus prestigieuses de la région Rhône-Alpes. Depuis sa création par Sabine Kouli en 1999, l’ensemble a développé une approche novatrice du gospel, intégrant également des éléments du negro spiritual et du soul gospel.  
La collaboration avec l’Orchestre des rencontres symphoniques pour ce concert promet une expérience musicale unique. Cette rencontre entre les voix puissantes du chœur et les instruments de l’orchestre créé une alchimie particulière, illustrant parfaitement la capacité du gospel à se réinventer tout en conservant son essence spirituelle. La politique tarifaire, avec des prix variant entre 15 et 28 euros, permet l’accès à un large public, tandis que la validité maintenue des billets achetés pour la date initiale de septembre témoigne du professionnalisme des organisateurs.

4- Ananda Devi rallume la mèche de Rue la Poudrière

La réédition de Rue la Poudrière d’Ananda Devi en 2024 marque un moment important dans le paysage littéraire francophone. Ce roman percutant, paru initialement en 1989, trouve un nouveau souffle dans une édition de poche qui lance la collection « Sira » des éditions Project’îles, confirmant ainsi sa place dans le patrimoine littéraire contemporain.

L’œuvre nous emmène dans les rues animées de Port-Louis, la capitale mauricienne, guidés par le regard lucide de Paule, une jeune femme issue des quartiers défavorisés. Ananda Devi excelle dans l’art de révéler une île Maurice authentique, loin des clichés touristiques. Elle peint avec justesse un tableau saisissant d’une société aux prises avec les inégalités, les tensions de genre et la précarité.

Le talent de l’auteure, récemment récompensé par le prestigieux Prix Neustadt 2024, se manifeste pleinement dans cette œuvre. Son écriture, à la fois crue et poétique, offre une réflexion profonde sur la condition humaine. Rue la Poudrière s’affirme ainsi comme un roman intemporel, dont la pertinence continue de toucher et d’interpeller les lecteurs d’aujourd’hui.

Cette réédition n’est pas un simple retour aux sources, mais bien la mise en lumière d’une œuvre qui, loin de s’essouffler, gagne en résonance avec le temps.

5- Demba : le film qui secoue le cinéma sénégalais

Le long-métrage Demba de Mamadou Dia, sorti en 2024, s’impose comme une œuvre majeure du cinéma sénégalais contemporain. Après sa sélection remarquée dans la section « Encounters » de la Berlinale, le film poursuit son parcours dans les festivals internationaux, portant haut les couleurs du cinéma africain.

Le film aborde avec subtilité et profondeur la question de la santé mentale à travers le portrait de Demba, un homme de 55 ans confronté au deuil de sa femme à l’aube de sa retraite. L’interprétation magistrale de Ben Mahmoud Mbow donne vie à ce personnage complexe, permettant d’explorer les défis liés à la dépression dans un contexte culturel où cette notion même ne trouve pas de traduction directe.

Le choix de tourner dans la commune de Matam avec des acteurs locaux ancre le film dans une réalité sociale spécifique, tandis que l’introduction d’éléments fantastiques, notamment à travers la présence spectrale d’Awa, la femme décédée, apporte une dimension poétique au récit. Le point culminant du film, lors de la fête traditionnelle de Tajabone où les rôles genrés s’inversent, illustre parfaitement la capacité du réalisateur à mêler traditions locales et questionnements universels.

6 – Cairo Shorts 2024 accueille les maîtres du court métrage

La 6e édition du Festival international du court métrage du Caire (Cairo Shorts) se tiendra du 16 au 21 décembre 2024. Cet événement s’est imposé comme un rendez-vous important pour les professionnels et les amateurs de courts métrages.

Cairo Shorts se concentre exclusivement sur les œuvres de 4 à 30 minutes, incluant courts métrages, documentaires et films d’étudiants. Les critères de sélection sont stricts : les films doivent avoir été produits après janvier 2023 et être sous-titrés en anglais. Le format du festival favorise l’interaction, avec des séances de questions-réponses suivant chaque projection.

Au-delà des projections, le festival propose un programme de séminaires et d’ateliers. Ces sessions visent à renforcer les compétences des cinéastes et à faciliter le réseautage professionnel. L’engagement de Cairo Shorts s’étend tout au long de l’année, avec un soutien continu aux réalisateurs indépendants pour la production et la distribution de leurs œuvres.

L’édition 2024 met l’accent sur la découverte de nouveaux talents. Elle offre une plateforme pour explorer la diversité du court métrage contemporain et rencontrer les créateurs qui façonnent l’avenir de ce format.

Cairo Shorts s’affirme ainsi comme un événement clé pour le cinéma de court format, alliant projection, formation et networking dans un cadre professionnel et dynamique.

7- La Biennale de Venise se met à l’heure africaine avec Koyo Kouoh

La nomination de Koyo Kouoh à la direction artistique de la Biennale de Venise 2026 marque un tournant historique dans le monde de l’art contemporain. Cette conservatrice suisse camerounaise de 57 ans devient ainsi la première femme africaine à occuper ce poste prestigieux, succédant au Brésilien Adriano Pedrosa.

Son parcours exceptionnel, qui l’a menée des rues de Douala à la direction du Zeitz-MOCAA au Cap, témoigne de sa capacité à transcender les frontières culturelles. Sa vision du panafricanisme, enrichie par son expérience internationale, explore ce qu’elle nomme les « géographies noires » – ces espaces culturels qui tracent les influences africaines à travers le monde, du Brésil aux États-Unis.

La transformation qu’elle a opérée au Zeitz-MOCAA, convertissant d’anciens silos à blé en un temple de l’art contemporain africain, illustre sa capacité à réinventer les espaces et les narratifs artistiques. Sa nomination, proposée par le président de la fondation, promet une édition 2026 novatrice qui s’inscrira dans la continuité du travail pionnier d’Okwui Enwezor en 2015.