Politiquement, les désengagements de la France au Sahel ont été payés au prix fort et ont fait couler beaucoup d’encre. En revanche, si financièrement les coûts ont été, eux aussi, très élevés, le sujet est passé en dessous des radars. Il faut bien reconnaître que dans ce domaine la transparence de prime pas.
Il aura fallu qu’une députée du Rassemblement National, Marie-France Lorho, pose une question sur le coût du rapatriement des forces françaises du Niger pour que le ministre des Armées fasse la lumière sur le sujet.
Alexis Koehler récompensé
En résumé, le départ précipité de nos militaires, après le coup d’Etat de juillet 2023, a coûté une centaine de millions d’euros qui se répartissent comme suit : 12 millions de matériels laissés sur place car non-démontables, 600 000 euros de primes d’opérations extérieures pour les soldats et 80 millions d’euros pour le transport aérien, terrestre et maritime. C’est le groupe MSC qui a obtenu le contrat pour le rapatriement du matériel. MSC est une société bien connue de l’Elysée puisqu’elle a valu à son Secrétaire général, Alexis Koehler une mise en examen en septembre 2022 pour prise illégale d’intérêt en raison de ses liens familiaux avec les propriétaires dudit groupe, la famille italienne Aponte.
Pour la petite histoire, le désengagement du Niger est tombé à point nommé pour l’armateur. En effet, en mars 2022, MSC a racheté la filiale logistique de Bolloré au prix fort : 5,7 milliards d’euros avant que la France ne perde toutes ses positions dans le Sahel. Vieux routier du continent africain, Vincent Bolloré a senti la déroute française arriver avant l’Elysée !
Un déménagement moins onéreux
Le déménagement du Niger aura néanmoins été beaucoup moins coûteux que prévu. En octobre 2023, devant l’Assemblée nationale, Sébastien Lecornu prévoyait alors une enveloppe comprise entre 200 et 400 millions d’euros. A moins que le ministère des Armées ait omis de mentionner des frais dans sa réponse à la députée Lorho.
En effet, le mois dernier, le sénateur Jean-Luc Ruelle avait lui aussi interrogé le ministre des Armées en apportant quelques précisions dans sa question : « certaines informations de terrain portent à croire que tout l’équipement militaire, n’a pas pu faire l’objet d’un rapatriement et a donné lieu à des destructions volontaires, notamment de blindés et d’armement ou à un enfouissement pour les munitions. La totalité des équipements militaires a-t-elle été rapatriée en France ? Confirmez-vous des détériorations délibérées ? Quel est le coût exact de ce désengagement militaire ? » La réponse du ministère des Armées est attendue avec intérêt et impatience.
Un milliard d’euros par an
Beaucoup d’autres interrogations peuvent s’ajouter à celles de ce sénateur : combien a couté le désengagement de Barkhane au Mali et celui de l’opération Sabre au Burkina Faso ? Quel a été le prix global payé par la France pour Takuba, une coalition mort-née de forces spéciales européennes ? En même temps, comme dirait le Président, puisque les militaires français n’interviennent plus au Sahel, la France fait des économies !
Bon an, mal an, Barkhane coûtait au contribuable français entre 800 000 et 1 milliard d’euros