La Libye entre le pillage d’or et les monnaies falsifiées

Depuis la chute du dictateur libyen Mouammar Kadhafi en 2011, deux forces s’affrontent sans merci: le Gouvernement d’Union Nationale (GUN) basé à Tripoli et l’armée nationale libyenne (ANL) du maréchal Haftar installée à Benghazi.  Les puissances occidentales continuent à imposer le maintien de l’approvisionnement en hydrocarbure sur le marché international.

En dépit d’un long processus de paix, initié à travers un marathon de conférences de réconciliation, les armes n’ont jamais cessé de prendre le dessus. Les deux protagonistes sont soutenus par leurs parrains respectifs. À savoir  la Turquie et le Qatar pour le GUN; les Émirats Arabes Unis, l’Egypte et l’Arabie Saoudite pour l’ANL.

Sur fond de milices incontrôlées qui s’approvisionnement en armes, en or ou en fausses monnaies sur les marchés parallèles.

Un vaste trafic de l’or a été démantelé dans la ville de Misrata. Il est orchestré par de hauts responsables de Douanes de l’aéroport international de la ville située à deux cent kilomètres de Tripoli. Le procureur général a ordonné l’arrestation du directeur général des douanes contenu de la gravité de l’affaire. L’opération visait à faire sortir 25875 kilos d’or, une valeur de près de 1,8 milliard d’euros du cours en vigueur, sous forme de lingots. Seule la banque centrale libyenne est autorisée du transfert de l’or hors du pays comme l’indique la législation Libyenne dans ce domaine.

Misrata, fief des Frères Musulmans

Misrata est la troisième ville du pays, après Tripoli et Benghazi. La ville s’est développée grâce au commerce régional notamment avec la Turquie et le Qatar. La ville est réputée pour être le fief des frères musulmans dont le Maire, Mohammed Echtewi, l’a payé de sa vie suite à son enlèvement à l’aéroport de Misrata, le 17 décembre 2017, de retour de Turquie. Selon la commission mixte de recensement, des éléments groupes armées, a évalué plus de 200 milices armées à Misrata dont l’effectif dépasse les 20 000 hommes.

Pourtant, bien avant l’arrestation des douaniers de Misrata, l’ONG américain the Sentry (sentinelle) a dénoncé le trafic de l’or, dont la ville de Misrata joue le rôle de zone de transit de contrebande d’or vers la Turquie et les Emirates arabes unis. L’organisation spécialisée dans les enquêtes sur les réseaux prédateurs multinationaux qui profitent des conflits violents, de la répression et de la kleptocratie dévoile une cartographie du trafic. Elle mentionne l’existence d’une concurrence dans le trafic de l’or entre les ports et aéroports des villes de Misrata, Zliten, khoms dépendant du gouvernement de Tripoli avec le port et aéroport de Benghazi sous contrôle de l’armée de Haftar.

L’ONG accuse les deux entités de contrôler le trafic de l’or en prévenance du Sahel afin de financer la poursuite de la guerre. Etrangement, l’or est transféré dans les pays (Turquie et Emirates) qui soutiennent les deux armées (GUN et ANL) qui se partagent les richesses du pays.

L’arme des faux billets 

Tous les coups sont permis, qu’importe le préjudice subi par un Etat en mal de formation. En plus de l’instabilité politique et sécuritaire, devenues marque de fabrique du pays depuis 2011, la Libye traverse une phase de trafic de tout genre, de la traite humaine vers l’Europe, contre bande des armes vers le Sahel, mais aussi trafic de la monnaie à l’intérieur du pays.

La banque centrale libyenne, dont le siège est à Tripoli et dépendante du gouvernement union nationale, a révélé fin avril qu’une opération de déstabilisation financière était en cours. Le marché monétaire a été inondé par des faux billets de 50 dinars (équivalent de 10 dollars). Le ministère des finances a procédé au retrait des deux versions des billets du marché monétaire du pays et a appelé les libyens a déposé les billets affectés au sein des établissements bancaires.   

La presse tripolitaine n’a pas tardé à désigner le coupable. Elle désigne une ferme dans la banlieue de Benghazi contrôlée par les milices Russes Wagner (dénommés le corps africain) qui est le soutien militaire de l’ANL du maréchal Haftar. Depuis son échec dans la prise de Tripoli, en 2019, il a perdu 9 villes importantes en 24 heures, le maréchal de cyrénaïque, est entré dans une crise financière avec la milice Russe Wagner.

L’organisation de Prégojine exigeait le paiement des soldes de ses effectifs, qui se chiffrent à 150 millions de dollars. C’est à partir d’août 2023 que les relations entre les deux entêtées militaires se sont améliorées. La crise de haftar et la milice Russe a trouvé un dénouement avec la visite du vice-ministre de la défense Russe, l’ingouche Iuounous-Bek Levkorov, à Benghazi seulement. La restructuration de la milice Wagner, en l’intégrant son fonctionnement au sein de l’armée régulière, après la disparition de son fondateur Evguini Prigogine, a simplifié la réconciliation

La déstabilisation monétaire

Au cours du mois de septembre 2019, cinq mois après son échec de la prise de Tripoli, la marine Maltaise a intercepté un navire transportant une cargaison de dinars libyen imprimé en Russie à destination du port de Toubrouk dans l’Est de la Libye contrôlé par l’armée de Haftar. « Plus de 4,5 milliards de dinars telle était la valeur des faux billets saisis », mentionne l’agence Reuter.

Auparavant, en été 2016, le Libya Herald a révélé la présence de faux billets sur le marché monétaire libyen sans désigner le responsable de la contrefaçon. Les experts de la société britannique chargée de l’émission du dinar légitime est venue examiner l’ampleur de la falsification. Elle a procédé à l’assainissement des billets contrefaits. Le gouvernement de Tripoli suspecte la société Josnak, une société appartenant à l’Etat Russe, d’être derrière la manœuvre d’inondation du marché monétaire de 2019 et 2020, juste après l’échec de la prise de Tripoli par l’armée de Haftar.  

Entre 2015 et 2020, près de 12 milliards de dinars ont été imprimés par les Russes en Libye. La masse monétaire contrefaite a servi comme solde de diverses milices de la Cyrénaïque, ce qui a provoque une inflation galopante. La démarche visait provoquer la dévaluation du dinar libyen émis par la banque centrale libyenne du gouvernement officiel.