Emmanuel Macron reste partisan d’un compromis avec l’Algérie

Lors d’une conférence de presse à Porto, dans le cadre d’une visite d’État au Portugal, le chef de l’État français, Emmanuel Macron, a également mis en garde contre les « jeux politiques » qui enveniment le débat sur l’immigration, un sujet sensible qui continue de fragiliser les relations franco-algériennes.« Nous n’avancerons pas s’il n’y a pas un travail. On ne peut pas se parler par voie de presse, c’est ridicule, ça ne marche jamais comme cela », a déclaré Emmanuel Macron, insistant sur la nécessité d’un dialogue constructif entre les deux nations.

Les relations entre les deux Présidents ont toujours été bonnes et le restent
Le président Emmanuel Macron, qui avait considéré l’Algérie, durant son premier quinquennat et jusqu’à la dissolution du printemps dernier, comme un partenaire privilégié au détriment d’un Maroc injustement malmené à l’époque par l’Élysée, s’est exprimé à Lisbonne sur la crise entre Paris et Alger. Le chef d’état français qui n’a cessé d’envoyer ces dernière semaines des émissaires à Alger -ses propres conseillers tout comme le patron des services français, tous reçus au plus haut niveau- appelle aujourd’hui encore à un apaisement dans le bras de fer qui oppose le gouvernement du Premier ministre français, François Bayrou, au pouvoir Algérien. 
 
Le président Macron a révélé avoir eu des discussions avec son homologue algérien lors de sa visite d’État en Algérie. Il avait été prévu de « rouvrir » le dossier sur l’accord de 1968 sur les conditions d’entrée des Algériens en France pour le moderniser. « Beaucoup de choses qui doivent être faites faite de part et d’autre » dixit le président Macron

La politique du pire

 
La volonté des deux Présidents de rechercher un vaste compromis aura connu son point d’orgue fin décembre. La libération de l’écrivain franco algérien Bouallem Sansal qui a été si proche via une loi d’amnistie rendue publique par la Présidence algérienne, a buté sur des forces hostiles aussi bien à Paris qu’à Alger.
 
Coté algérien, certains clans au pouvoir notamment à la tète du contre espionnage ont tout fait pour jouer la politique du pire et envenimer les liens historiques entre les deux pays, comme Mondafrique l’avait raconté. C’est ainsi que ces officines malfaisantes ont envoyé en France, notamment à partir du mois de janvier, des influenceurs violents et grossiers qui ont appelé appelé à éliminer les opposants et qui ont cherché à transposer sur le territoire français les rivalités de pouvoir algérien. Soit une occasion inespérée pour Bruno Retaillau et ses alliés d’élever la voix, d’entreprendre des poursuites (légitimes) contre ces faux lanceurs d’alerte et de tenter, mais sans succès, de renvoyer en Algérie ces seconds couteaux, souvent condamnés pour délinquance, qui ont cherché à arrondir ainsi leurs fins de mois
Coté français, l’état d’esprit hostile à l’immigration du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau n’a pas favorisé une de ces réconciliations dont Paris et Alger ont le secret. Les forces politiques qui le soutiennent, de la droite du macronisme à son ami Eric Ciotti, aux cadres de son parti Les Républicains (LR) et au Rassemblement National sont devenues le centre de gravité de la classe politique. Ce sont elles qui ont mis du feu sur les braises, sans que des voix dans l’opposition, piégées par le débat tronqué sur l’immigration, sachent élever le débat et rappellent l’importance de l’Algérie pour la France. Ce qu’a tenté malgré tout Emmanuel Macron qui a maintenu, mais sans avoir vraiment la main, un canal de communication avec le président Tebboune.
 
Les contentieux entre les deux pays sont nombreux, connus et hélas réels: le sort de Boualem Sansal, maintenu en détention en Algérie, pour des déclarations volontiers provocantes sur la nature des frontières algériennes; la politique des visas traditionnellement bienveillance pour les oligarques et leurs familles propriétaires de biens immobiliers en France; le renvoi de quelque milliers de délinquants algériens condamnés en France dont Alger ne reçoit qu’au compte goutte. Dans ses déclarations, Emmanuel Macron a insisté sur le fait que les accords de 1994, qui prévoient la reprise automatique des ressortissants algériens en situation irrégulière, doivent être « pleinement respectés ». « Rien ne peut prévaloir sur la sécurité de nos compatriotes », a-t-il affirmé, tout en saluant la « coopération qui existe » entre les deux pays sur ce sujet.
 
Plus grave, c’est que le ministre français de l’Intérieur, dont la candidature à la Présidentielle se précise, exprime le ressenti d’une droite et d’une extrême droite qui n’ont jamais digéré l’indépendance de l’Algérie et une forme de nationalisme exacerbé qui est la marque de fabrique du régime algérien. Nons sans une grande lucidité, ‘historien Benjamin Stora a qualifié ces incompréhensions de « guerre des mémoires »

Mesquineries et provocations

 
Avec un Retaillau désormais devenu l’homme fort du gouvernement, les mesquineries les plus mesquines succèdent aux déclarations intempestives les plus intempestives. C’est à travers un communiqué de l’Agence presse service (APS), diffusé  le samedi 1 mars, qu’on apprend la femme de l’ambassadeur d’Algérie au Mali, munie d’un passeport diplomatique, s’est vue notifier l’interdiction de rentrer sur le territoire français. Pur prétexte, la direction des airs et des frontière justifie son refus du fait que cette citoyenne algérienne ne disposait pas suffisamment de ressources financières pour entrer en France, bien qu’elle ait présenté un certificat d’hébergement, une attestation d’assurance et une carte de crédit de son épouse.
 
Le communiqué algérien évoque une « provocation de plus », et « un double discours » au sein des sérails de l’Etat français en faisant référence aux déclarations du président français depuis le Portugal.
 
Cette fois, on ne peut pas donner tout tout à fait aux autorités d’Alger. Mais la diplomatie algérienne qui fut une des plus performantes des pays non alignés, retrouverait son crédit en éliminant les brebis galeuses favorables d’une politique de rupture avec Paris et en libérant enfin un Bouallem Sansal, l’arbre qui permet aux forces anti algériennes en France de masquer leurs intentions hostiles.