Désignés têtes de liste de leur différent camp, l’ancien président Macky Sall et son adversaire de toujours devenu Premier ministre, Ousmane Sonko, vont devoir solder leurs vieux comptes politiques dans l’arène des élections législatives anticipées prévues le 17 novembre.
Correspondance à Abidjan, Bati Abouè
C’est un deuxième tour inédit de la présidentielle de mars 2024 qui avait opposé Bassirou Diomaye Faye, qui a remplacé au dernier moment Ousmane Sonko dont la candidature avait été rejetée en raison de son emprisonnement, et le Premier ministre de Macky Sall, ce dernier ne pouvant pas briguer un troisième mandat. Mieux, on aura finalement droit au face-à-face entre Macky et Sonko qui vont solder leurs vieux comptes politiques.
Il n’empêche que nul n’aurait pu rêver de cette affiche six mois plus tard, tant l’ancien président s’était rapidement éclipsé après l’investiture de son successeur Bassirou Diomaye Faye, fuyant presque vers une nouvelle vie d’exilé au Maroc. Cela dit, il est difficile de vivre heureux caché quand on a été président de la République pendant dix longues années et que les adversaires qu’on avait durement réprimés se retrouvent à la place qu’on occupait et qu’ils ne jurent que par votre perte.
L’ex-président, tête de liste
Telle est probablement l’histoire que cache le retour de l’ancien président Macky Sall en première ligne où, pour survivre, il doit désormais retrousser les manches pour préserver les chances de son parti de se maintenir en situation de cohabitation, sa seule chance de survie.
Macky Sall a donc accepté d’être la tête de liste de la coalition qui réunit son parti, l’Alliance pour la République (l’APR), mais aussi le Parti démocratique sénégalais (PDS) de Karim Wade et une centaine d’autres mouvements. C’était un « choix naturel », affirme Pape Mahawa Diouf, l’un des cadres du parti de l’ex-président pour qui « la personnalité et le bilan » de l’ex-président font « l’unanimité », auprès des membres de la coalition.
Face à lui, le Pastef, parti désormais au pouvoir, a lui choisit le Premier ministre Ousmane Sonko, son plus acharné adversaire, pour aller à la conquête d’une majorité pà l’Assemblée nationale, seul moyen pour le régime d’appliquer son projet social et de répondre concrètement aux attentes des populations dont la jeunesse qui continue de mourir dans l’Atlantique en raison du chômage et du désespoir ambiant.
Une opposition divisée
Chaque camp prépare donc la campagne électorale durant laquelle tous les coups seront permis. Mais face au parti au pouvoir, gonflé à bloc, l’opposition apparaît divisée en dépit du retour de Macky Sall. Les trois grandes coalitions, l’une menée par Macky Sall, l’autre par l’ancien Premier ministre Amadou Ba et la dernière par le maire de Dakar, Barthélémy Dias, n’ont en effet toujours pas réussi à se mettre d’accord sur une stratégie électorale commune afin d’éviter la dispersion des voix. Et, pour l’heure, un accord a été trouvé uniquement dans deux départements sur 46.
L’opposition a pourtant beaucoup à perdre. D’autant que sa majorité parlementaire avait été obtenue du temps où Macky Sall était encore président de la République. Conséquence, cette élection constitue un véritable saut dans l’inconnu dans la mesure où le candidat de l’ancien régime, le Premier ministre Amadou Ba, avait été lourdement sanctionné lors de la présidentielle de mars 2024.
Dans ces conditions, est-ce que le retour en première ligne de l’ex-président Macky Sall suffira à créer l’élan rassembleur dont l’opposition a tant besoin pour battre le Pastef ? La question est posée même si lors des deux dernières alternances, les Sénégalais ont toujours confirmé aux législatives le choix fait lors de la présidentielle, affirme le professeur en sciences politiques Moussa Diaw.