Le samedi 4 octobre, l’opposition appelle à une manifestation dans toutes les villes de Côte d’Ivoire. Les organisateurs s’attendent à un mouvement d’ampleur qui pourrait mal tourner avec le déploiement de 18 000 policiers, 18 000 gendarmes et 8000 militaires. A quelques heures d’une confrontation possible, les Ivoiriens, quelles que soient leurs opinions politiques, se préparent au pire afin de ne pas être pris au dépourvu en cas d’avis de gros temps…
Le Front commun, la coalition qui regroupe les deux plus grands partis d’opposition, le PPA-CI de l’ex-président Laurent Gbagbo et le PDCI dirigé par Tidjane Thiam, appelle à manifester contre le 4ème mandat du Président Alassane Ouattara et contre leur exclusion respective du processus électoral. C’est le premier appel qu’ils lancent depuis la décision du Conseil constitutionnel du 8 septembre dernier qui a invalidé ces deux candidats de la course à la présidentielle du 25 octobre.
Top départ
L’opposition n’a pas choisi cette date du 4 octobre par hasard. Il s’agissait d’attendre que les salaires soient versés à la fin du mois pour que la population ait les moyens et le temps de faire des provisions. Ce qui laisse à penser que la manifestation de samedi n’est que le début d’une mobilisation plus longue. Qu’ils soient pour l’opposition qui promet d’en découdre en déclarant « qu’il n’y aura pas de 4ème mandat », pour le parti au pouvoir en jurant qu’ « il n’y aura pas de problème », ou encore de la majorité dite « silencieuse » qui prie pour que tout aille bien, tous les habitants d’Abidjan se préparent. Ils ont encore en mémoire les événements de 2011 qui avaient pris tout le monde de court. Alors, selon leurs moyens, ils stockent poulets, poissons, attiéké et sacs de riz de 25 kilos. Les plus prévoyants envisagent aussi les coupures d’internet et achètent des unités de téléphone.
En ordre de bataille
Ils s’attendent à tout, car le climat se tend aussi du côté du pouvoir où toutes ces préparations à Abidjan comme à l’intérieur du pays sont scrutées de près. Le dispositif sécuritaire est en place avec le déploiement de 18 000 policiers, 18 000 gendarmes et 8000 militaires. Si les autorités n’ont, pour l’instant, pas interdit les marches, elles ont, en quelque sorte, déjà pris les devants en arrêtant plusieurs figures de l’opposition.
Le 30 septembre et le 1er octobre, trois secrétaires généraux adjoints du PPA-CI, Blaise Lasm, Nestor Dahi et Keke Joël ont été inculpés de provocation à l’insurrection, troubles à l’ordre public, atteinte à l’autorité de l’Etat. Ils ont été incarcérés au PPA (Pôle Pénitentiaire d’Abidjan), nouvelle appellation de ce qui était autrefois appelé la MACA.
Marie Odette Lorougnon, vice-présidente du même parti, a, elle, été gardée à vue pendant plus de 72 heures avant d’être libérée. Amadou Coulibaly, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement s’est défendu lors d’une conférence de presse : « Il ne faut pas faire d’amalgames. Les personnes interpellées l’ont été parce qu’elles ont commis des délits et non en raison de leur appartenance à l’opposition. »
« Le combat sera sans merci »
Il n’en reste pas moins que ces procédures judiciaires ne sont pas de nature à pacifier les esprits. A deux jours de la marche, ces arrestations renforcent la détermination des partis politiques et de leurs militants. Les députés du PPA-CI, du PDCI et deux non-inscrits, sont d’ailleurs montés d’un cran le 1er octobre en refusant de participer à la cérémonie solennelle de rentrée parlementaire. Selon le communiqué de ces élus, il s’agit d’alerter l’opinion publique nationale et internationale « sur le fait que le régime RHDP (parti au pouvoir) refuse obstinément de créer les conditions d’une paix durable et d’une indispensable cohésion sociale ». Ils protestent également contre « la répression politique et les atteintes aux droits humains ».
Un cadre d’une de ces formations commente la situation actuelle en Côte d’Ivoire : « le combat a démarré et ce sera sans merci. »
Présidentielle ivoirienne, l’opposant Pascal Affi Nguessan tire la sonnette d’alarme