Ces charmeurs de serpents marocains qui maltraitent les reptiles

Les charmeurs de serpents, ou Aïssaoua, exercent leur activité à Marrakech au coeur de la place Jemaa El-Fna qui figure sur la liste Unesco représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité en 2008. Ceci au prix d’une souffrance animale devenue choquante

La légende raconte qu’un jour, Sidi Mohamed Ben Aïssa traversait le désert avec 40 de ses disciples torturés par la faim. Les disciples se plaignirent au maître qui, dans un premier temps, ne répondit pas. Il finit par leur dire d’avaler tout ce qu’ils trouveraient, y compris vipères, scorpions et autres espèces venimeuses.

Des dizaines de serpents et de scorpions furent ainsi consommés et, par miracle, les hommes survécurent, tant la parole du maître était puissante. Depuis ce jour, les descendants de Ben Aïssa seraient immunisés contre les morsures de serpents, protégés par une baraka vieille de quatre siècles. On les appelle les Aïssaoua.

Pourtant, cette activité a un impact sur la biodiversité et engendre de la souffrance animale que la notion même de développement durable devrait nous inciter à prendre en compte.

Une vipère vient de mettre bas dans la caisse du charmeur, mais la moitié des jeunes sont morts. Abdellah Bouazza

 

Serpents de Jemaa El-Fna 

Les serpents sont des animaux qui suscitent en Occident de nombreuses légendes, tout aussi rocambolesques les unes que les autres. Du serpent qui boit du lait aux vipères lâchées par hélicoptère, le serpent fait peur, le serpent inquiète.

Sa présence sur le caducée, symbole de la santé, ne parvient pas à nous faire oublier qu’il est celui qui a convaincu Ève de croquer la pomme.

Pas étonnant que sur la place Jemaa El-Fna, les Aïssaoua capables de dompter cet animal fascinent. Le charmeur va poser le serpent au sol, et par de nombreuses provocations stressantes, va déclencher le comportement de défense du reptile, plongeant les visiteurs dans un émerveillement empreint de peur et d’exotisme, que le lieu, avec le son des flûtes, mais aussi ses odeurs et son ambiance, contribue à véhiculer.

Les visiteurs ont ainsi la sensation de vivre une expérience unique qui, malgré sa fugacité, participe à la notoriété de cet espace. Le charmeur doit démontrer son pouvoir ; c’est la magie, « la baraka », qui lui permet ses interactions avec le serpent. Le discours diffusé auprès des touristes a pour but de conforter le visiteur dans ces représentations négatives et insidieuses de l’animal, contribuant dans un même temps à renforcer la magie du spectacle.

Le cobra ne danse pas

Les charmeurs exhibent plusieurs espèces de serpents, notamment la vipère heurtante (Bitis arietans), la couleuvre de Montpellier du Sahara (Malpolon monspessulanus saharatlanticus) et le cobra d’Afrique du Nord ou cobra noir du Maroc (Naja haje legionis).

Le cobra est difficile à trouver dans la nature, mais il constitue l’espèce la plus recherchée par les charmeurs. Il se rencontre principalement dans le Sahara atlantique et parfois dans certaines oasis au sud du Haut Atlas.

À l’instar des autres serpents, le cobra ne possède pas d’oreille externe, ainsi il ne « danse » pas au son de la flûte des Aïssaoua. Il adopte plutôt une position de défense en « coiffant » sa tête et suit du regard les charmeurs, qui donnent ainsi l’illusion que le serpent bouge au son de l’instrument.

Cette attitude charismatique donne la sensation d’une provocation, au cœur du spectacle.

Sécurité du touriste, souffrance du serpent

Les serpents utilisés dans les spectacles des charmeurs de la place Jemaa El-Fna sont capturés directement dans la nature, notamment dans les habitats désertiques du Bas Draâ (Tan Tan-Guelmim). Vipères et cobras sont ensuite manipulés et bloqués au cou pour leur ouvrir la gueule et leur arracher les crochets.

Cette opération, réalisée sans précaution d’hygiène ni anesthésie, est censée garantir la sécurité des touristes et des charmeurs. Les serpents sont ensuite maintenus dans des caisses en bois, en attendant d’être vendus aux charmeurs de Marrakech qui à aucun moment ne se déplacent eux-mêmes sur le terrain.

Déshydratés, sans accès à de la nourriture ni à une température favorable pour se thermoréguler, certains meurent d’une infection due à l’opération, d’autres du fait des conditions de vie stressantes associées à une nourriture inadaptée et imposée de force, comme nous avons pu l’observer sur le terrain.

Vipère heurtante fraîchement capturée, dont les crochets sont arrachés. 

Le spectacle à quel prix ?

Le spectacle n’a en effet de sens que par la position de défense de l’animal, position qu’il est contraint de maintenir des heures durant pour répondre aux provocations du charmeur ; un processus qui, lentement, épuise l’animal.

Jugée cruelle, cette pratique a été interdite en Inde en 1972, tandis qu’elle demeure encore utorisée au Maroc. Le développement touristique de la place Jemaa El-Fna a beau avoir induit des modifications, les charmeurs font malgré tout partie des activités qui suscitent le plus d’attrait pour de nombreux touristes

Inconsciemment, ces derniers participent donc sans le savoir à la souffrance et à la disparition d’espèces sauvages, nous conduisant à nous poser la question suivante : la sauvegarde du patrimoine culturel est-elle toujours compatible avec les enjeux de développement durable qu’il sous-entend ?


Thomas Lahfali, naturaliste indépendant, a contribué à la rédaction de cet article

6 Commentaires

  1. @Omar, Kannich Yassine et Ahmed Ben Mohamed, comme l’avait dit Napoléon Bonaparte : « Un bon croquis (ici tableau) vaut mieux qu’un long discours  » :
    Maroc :
    Population : 37, 34 millions
    PIB : 173,22 (62ème)
    Tau de chômage : 11,7 %
    Dette : 63,3 milliards de dollars
    IDH : 0,683 (moyen 123ème)
    Taux d’analphabètes : 47,5 % milieu rural et 22,6 % en milieu urbain
    Nombre d’élèves primaire-collège-lycée : 8 millions (21,4% de la population)
    Nombre d’étudiants : 1,238 (3,3 % de la population)

    Algérie :
    Population : 45 millions
    PIB : 193,6 (56ème)
    Tau de chômage : 11 %
    Dette : 2,9 milliards de dollars
    IDH : 0,741 (élevé 91ème)
    Taux d’analphabètes : 7,4 %
    Nombre d’élèves primaire-collège-lycée : 11 millions (24%de la population)
    Nombre d’étudiants : 1,7 millions (3,7 % de la population)
    Remarque :
    En Algérie, on ne trouve pas de « femmes mulets » transportant de grosses charges entre Ceuta et Melilla et le Maroc pour nourrir leurs enfants.

  2. Pour répondre à l’auteur de l’article, sans nier l’atrocité que vivent ces animaux,  combien de charmeurs de serpents existent à Marrakech ? Un ou deux… A-t-il recensé le nombre de personnes qui meurent chaque année au Maroc suite à des morsures des serpents et des scorpions. Mais, un article de défense des animaux est plus vendeur qu’un article de défense des être humains.

    Et, en réponse à le Corée de l’Est dont le venin est plus dangereux que celui de ces bestioles, malgré les mers de pétrole, de gaz et de richesses dont elle dotée, le niveau de vie des marocains est au moins équivalent au leur. La petitessee de leur cervelle qui ne dépasse pas celle de ces petites bestioles ne leur a pas permis d’avoir de politique qui leur permet de sortir de leur misère. Tout ce qu’ils  savent faire, c’est répandre la haine autour d’eux. Tout ce qu’ils ont pu faire de bien en agriculture ou en industrie ou ailleurs, c’est en imitation de ce que fait le Maroc et en essayant de le concurrencer.

    Il n’y plus au Maroc de personne qui utilise le terme  » makhzen » ou qui sait ce qu’il signifie. Il n’y a plus au monde que la Corée de l’Est qui utilise encore ce terme.

    Qu’elle continue, grâce à la politique des ses dirigeants séniles, de patauger dans sa haine jusqu’à son épuisement final. Le Maroc exploite en bonne intelligence les moyens même modestes dont il dispose pour avancer et se développer.

  3. Des voisins malades, obsédés par le MAROC, à l’affût de la moindre occasion pour attaquer ceux, qui un jour prirent la carabine et partirent vers l’Est pour venir en aide à leurs frères les Algériens!
    Les voila aujourd’hui, des ingrâts qui suscitent la pitié!
    Sans trop parler, je ne veux savoir qu’une seule chose,
    Comment se fait-il, qu’un citoyen qui vit dans un pays qui regorge de gisement de pétrole et de gaz, vit dans une misère absolue, faisant toujours la queue pour juste des denrées alimentaires…au lieu de se préoccuper de ses affaires, au lieu de chercher l’erreur fatale dans son pays, il attend de s’attaquer au Maroc en raison da sa maltraitance des serpents !!! Hhhhh
    Des humains maltraités, humiliés par les vieux caporaux, et pourtant on se contente de regarder de loin, on n’ose même pas se moquer! Car enfin c’est des humains

  4. Le royaume du cannabis vit encore au siècle dernier. Il ignore complètement ce que signifie « souffrance des animaux » puisque même son peuple vit dans les grandes difficultés sur tous les plans. La misère ajoutée à la répression du Makhzen poussent le peuple à subvenir à ses fins par tous les moyens. Une grande partie des activités de la place de Jemaa El-Fna ne sont pas acceptées par un pays civilisé et digne de ce nom.
    Quand un royaume, vivant comme au moyen âge, est premier producteur de cannabis et premier exportateur avec plusieurs milliers de tonnes de cannabis on ne peut rien attendre de positif. Les conséquences de ces activités sur les jeunes, futurs cadres des nations, sont catastrophiques du point de vue santé, vie familiale et professionnelle.

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