Cherchant à couper court au débat sur son intention de rester au pouvoir au-delà de 2026, le président béninois Patrice Talon a réaffirmé qu’il quittera ses fonctions au terme de son mandat actuel. Sans pour autant réussir à lever tous les doutes.
« Depuis 2019, nous avons espéré avoir définitivement réglé cette affaire au Bénin. C’est d’ailleurs à mon initiative que nous avons ajouté dans la Constitution que nul ne peut désormais exercer de sa vie plus de deux mandats. Que la Constitution soit nouvelle, qu’il s’agisse d’une nouvelle république, aucun vivant ne peut faire plus de deux mandats au Bénin ».
Dans une colère à peine contenue, le président béninois Patrice Talon a profité du début de la nouvelle année 2025 pour répondre à ceux qui le soupçonnent toujours de vouloir se maintenir au pouvoir après la fin de son second mandat en 2026.
« Nous avons espéré qu’à partir du moment où cette phrase existe et qu’elle sera prononcée à chaque fois, il n’y a aucune raison de soupçonner le président que je suis de vouloir faire un troisième mandat. Comme la fin du mandat arrive, on fait comme si cette phrase n’existait pas, comme si bien qu’elle y est inscrite, cela ne suffit pas à nous apaiser », s’est irrité le président béninois.
Pour lui, le débat sur son agenda caché d’un troisième mandat est un procès d’intention instruit par des opposants politiques qui cherchent coute que coute à exister.
« Ce débat est malheureux. Il est le fait des acteurs politiques qui cherchent à se donner une raison d’exister, pour créer de la polémique pour chercher à animer la vie politique avec un sujet qui n’en est pas un », a déploré vivement le président Talon.
Les raisons du doute
Il n’est pas pour autant très sûr que cette sortie musclée du chef de l’Etat béninois ait levé tous les doutes sur son intention de se maintenir au pouvoir au-delà de son second mandat. A quelques mois de son départ du pouvoir, le président Talon ne semble pas avoir fait de sa succession une priorité de son agenda. Il n’a encore adoubé personne dans son cercle pour lui succéder. En effet, le président Talon ne marque aucune préférence, même discrète, pour une des personnalités du régime légitimes pour prendre sa succession : la vice-présidente Mariam Chabi Talata, le ministre d’Etat, ministre du Développement Abdoulaye Bio Tchané, le ministre d’Etat, ministre de l’Economie et des finances Romuald Wadagni ou encore le Garde des Sceaux, ministre de la justice et de la législation, Yvon Detchenou. On peut comprendre que le président sortant cherche à éviter d’ouvrir une guerre de succession fratricide dans son entourage. On comprend toutefois moins qu’il ne veuille pas avoir à cœur d’assurer ses arrières en préparant un dauphin, comme cela arrive sur le continent lorsque le chef de l’Etat sortant ne peut plus se présenter.
L’autre raison qui alimente les doutes sur la volonté du président de quitter le pouvoir, c’est le couperet qui tombe sur toute personne de son entourage qui manifeste son impatience de lui succéder en 2026. Beaucoup d’observateurs sont convaincus qu’Olivier Boko, homme d’affaires et ami personnel de Patrice Talon, jugé à Cotonou depuis hier mardi pour « complot contre l’autorité de l’Etat et corruption d’agent public » paye surtout le fait d’avoir manifesté son ambition de briguer le suffrage des Béninois lors de la prochaine élection présidentielle. Si Talon sévit contre ceux qui manifestent l’ambition de lui succéder, c’est parce qu’il veut garder le pouvoir pour lui-même, disent ceux qui doutent encore des assurances données par le président béninois. Partira ? Ne partira pas ? Le pari reste donc ouvert.
Seidik Abba