Alger, l’évasion spectaculaire du puissant général Nacer el Djinn

Alger vit depuis ce vendredi matin dans une atmosphère lourde, marquée par un dispositif sécuritaire d’une ampleur inédite depuis des mois. Selon plusieurs sources concordantes de Mondafrique, le général Abdelkader Haddad, plus connu sous son surnom Nacer el Djinn, l’ancien patron du contre espionnage algérien évincé voici quelques mois, mis en examen puis emprisonné avant d’être placé en résidence surveillée(voir l’article en PJ), se serait évadé de son lieu de détention, un camouflet pour le renseignement militaire qui avat été chargé de son arrestation et de sa surveillance.

La cavale du général Nacer el Djinn embarrasse gravement le pouvoir algérien. Les services de sécurité quadrillent Alger et ses environs, multipliant les contrôles et les opérations de ratissage. Des perquisitions auraient eu lieu dans plusieurs villas de quartiers huppés, notamment à Hydra et aux Tagarins (El-Biar), mobilisant des unités d’élite du GOSP.

Mais malgré cette traque, le général en fuite semble avoir pris une longueur d’avance : des informations non confirmées évoquent une exfiltration déjà en cours vers l’Espagne, pays où il avait trouvé refuge par le passé et où de nombreux gradés algériens ont construit de belles villas ces deernières années de préférence à la France où leurs arrangements financiers s’ébruitent souvent dans la presse.

Ascension fulgurante 
Nacer el Djinn, de son vrai nom Abdelkader Haddad, avait été promu général il y a environ quatre ans, après son retour d’exil en Espagne. Il avait quitté l’Algérie à l’été 2018, au moment des purges lancées par le défunt chef d’état-major Ahmed Gaïd Salah.

Réhabilité par la suite, il s’était vu confier des postes stratégiques dans les services de renseignement. D’abord, il prend la direction du tristement célèbre centre de détention et d’interrogatoire « Antar », situé au cœur d’Alger, connu pour les exactions qui y auraient été commises. Puis, en juin 2024, il est nommé à la tête de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), l’appareil central du renseignement algérien.

Cette ascension fulgurante avait suscité de vives polémiques, compte tenu de sa réputation sulfureuse et des accusations récurrentes de violences, de tortures et d’abus imputés à son passage dans les structures sécuritaires notamment pendant ces années noires (1992-1998) où l’armée algérienne est parvenue à éliminer le danger islamiste, mais souvent au prix de graves dérapages, alimentant une polémique sur l’origine des massacres commis pendant cette sale guerre connue sous l’apellation du « qui tue qui? ».

Selon des témoignages relayés dans l’entourage militaire, le général Haddad aurait été la cible d’humiliations et même de mauvais traitements infligés par certains de ses pairs, notamment au sein du CPMI (Centre principal militaire d’investigation) de Blida. Après avoir été emprisonné, il a été placé en résidence surveillée. Cette semaine, le général el Djinn devait être présenté à un juge.

Un séisme au sommet de l’État

La fuite de Nacer el Djinn, si elle est confirmée, risque de provoquer un séisme au sommet du régime. Elle met en lumière les rivalités intestines entre clans militaires et révèle l’extrême fragilité d’un système où les généraux les plus puissants d’hier deviennent, du jour au lendemain, des fugitifs traqués.

Pour l’instant, aucune communication officielle n’a été faite par les autorités. Une certitude: Alger est en état d’alerte maximale, et la disparition de Nacer el Djinn ouvre un nouveau chapitre explosif dans la guerre des généraux dans la mesure où le général el Djinn, s’il parvenait à gagner l’Europe, purrait négocier un statut de réfugié contre des révélations gênantes pour l’institution militaire.

L’éviction du patron du contre espionnage algérien, Nacer El Djinn

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)