Après avoir refusé d’admettre Kenneth Roth, ex-directeur général de Human Rights Watch (HWR) comme chercheur senior et après avoir refusé de lui attribuer une bourse pendant un an, la Harvard Kennedy School a changé radicalement d’avis jeudi 19 janvier. Elle a admis Kenneth Toth et a signé l’attribution de sa bourse d’étude.
Notre chroniqueur Yves Mamou estime que l’Université américaine n’aurait jamais du prendre une telle décision compte tenu des positions de ce chercheur sur la question palestinienne. Mondafrique publie volontiers cette libre opinion en raison de notre désir de toujours susciter un débat utile, sans pour autant nourrir une quelconque hostilité à l’égard des travaux de HuMan Rights Watch. Ainsi il faut rappeler que HWR tout en étant sévère à l’égard de la politique israélienne s’est toujours défendu d’appeler au boycott d’Israël.
Qu’est ce qui a motivé le refus initial ? La diabolisation d’Israël par Human Rights Watch sous la houlette de Kenneth Roth. Qu’est ce qui a fait changer d’avis le board de la Kennedy School ? L’émoi du monde universitaire en faveur de l’ex-directeur de HWR, un communiqué du Pen Club, le gauchisme estudiantin qui s’est mobilisé et la vilaine tournure médiatique prise par l’affaire.
Kenneth Roth est l’homme qui a pris en main en 1987 une petite ONG au budget de 7 millions de dollars qui salariait à peine quelques dizaines de personnes et qui a quitté son poste de directeur exécutif en 2022, laissant à son successeur une association influente, riche d’un budget de plus de cent millions de dollars, avec 500 collaborateurs couvrant plus de cent pays.
Le gouvernement israélien dans le collimateur
Mais Kenneth Roth est aussi l’homme qui a d’emblée stigmatisé la politique du gouvernement israélien dans les territoires dits « occupés » au nom des droits de l’homme. En 2021, dans le rapport intitulé « Un seuil franchi », Human Rights Watch est la première association de défense des droits humains à appliquer le terme « apartheid » à la politique israélienne. L’American Jewish Committee avait affirmé à l’époque que ces accusations « frisent parfois l’antisémitisme.
Les relations étaient devenues si conflictuelles entre HRW et le gouvernent israélien qu’en 2019, le représentant de l’association pour Israël et la Palestine, Omar Shakir, a été expulsé en vertu d’une loi qui interdit le territoire israélien aux étrangers qui soutiennent un boycott d’Israël ou de ses territoires.
Israel, « État paria »
L’accusation selon laquelle Human Rights Watch s’est montrée systématiquement hostile à Israël n’est pas nouvelle. En 2009, Robert Bernstein, fondateur et président de HRW de 1978 à 1998, a vivement critiqué dans le New York Times, le virage anti-israélien de l’ONG. La mission initiale de HRW, écrit-il, était « d’ouvrir les sociétés fermées, de défendre les libertés fondamentales et de soutenir les dissidents ». Mais concernant le conflit israélo-arabe, HWR avait plutôt « publié des rapports qui venaient en aide à ceux qui souhaitent transformer Israël en un État paria ». Le Moyen-Orient « est peuplé de régimes autoritaires avec un bilan épouvantable en matière de droits de l’homme », mais HRW « a écrit beaucoup plus de condamnations d’Israël pour des violations du droit international que de tout autre pays de la région ».
HRW a également été régulièrement attaqué par Gerald Steinberg, professeur émérite de sciences politiques à l’Université Bar-Ilan en Israël et président de NGO Monitor. Gerald Steinberg a accusé HRW de « jouer un rôle de premier plan dans la diabolisation d’Israël », de promouvoir un « programme anti-israélien » qui contribue à la haine de ce pays, et de cacher son parti pris politique derrière « la rhétorique des droits de l’homme ».
L’affaire Harvard-Kenneth Roth n’annule pas les accusations formulées contre l’ex-président de HRW. Elle témoigne seulement de la radicalisation propalestinienne des universités américaines. Et HRW a joué un rôle de premier plan dans cette radicalisation.