Dans la nuit du 3 au 4 avril, les quartiers sud de la capitale congolaise, Brazzaville, réputés hostiles au président Sassou ont été le théâtre des tirs d’anciens rebelles « Ninjas ».
Les Ninjas ont longtemps été contrôlés par l’ex-chef rebelle Frédéric Bintsamou, connu sous le nom de « pasteur Ntumi », qui, durant la guerre civile congolaise des années 1990, combattait aux cotés de Kolelas et de Sassou contre l’ancien président Lissouba. Or ce chef de milices, qui s’est rangé du coté des opposants à Sassou, est aujourd’hui pointé du doigt par les autorités comme le fauteur des troubles. Ce qu’il dément, dans un entretien avec « Mondafrique ». Les Ninjas, auteurs de ces tirs, explique le bon pasteur Ntumi, ont été réarmés à dessein par le pouvoir de Brazzaville afin de justifier la répression menée contre les populations du sud de la capitale traditionnellement opposées à Sassou Nguesso. Résultat: les populations résidentes dans ces zones ont été contraintes de quitter leurs habitations pour se réfugier au centre ou au nord de la ville et on veur lui faire porter le chapeau. Entretien
Mondafrique : Quelle est la situation actuelle à Brazzaville ?
Pasteur Ntumi : Le général Jean François Ndenguet, directeur général de la police nationale, depuis 1997, a recruté certains miliciens ninjas démobilisés. Cette situation intervient alors que la Cour constitutionnelle a publié les résultats définitifs de la réélection contestée de Denis Sassou Nguesso, au pouvoir depuis plus de 32 ans. Les autorités ont voulu imposer un état de siège pour publier les résultats afin d’étouffer toute velléité de contestation de la population. Les populations des quartiers sud fuient actuellement leurs habitations pour se réfugier au nord et au centre de Brazzaville. En fomentant ces attaques, le pouvoir de Brazzaville, souhaite justifier une action répressive d’envergure contre ces parties de la ville, réputées opposées à Denis Sassou Nguesso.
Mondafrique : Etes-vous personnellement en danger ?
Pasteur Ntumi : Effectivement oui. C’est pourquoi j’appelle la communauté internationale à s’exprimer le plus rapidement possible. Cette situation est la conséquence directe de la crise politique que le pays traverse aujourd’hui. Nous vivons une dictature qui ne dit pas son nom. Lors de la campagne présidentielle, mon cortège était attaqué au pont du Djoué alors que je venais d’assister au meeting de Guy Brice Parfait Kolélas, au stade Marchand. Trois de mes gardes du corps étaient tués.
Mondafrique : Pourquoi n’avez- vous pas donné, plus tôt, l’alerte à la communauté internationale sur le réarmement des ex-ninjas démobilisés ?
Pasteur Ntumi : Personne n’est dupe. Les ex-ninjas réarmés par le général Ndenguet n’en sont pas à leur premier forfait à Brazzaville. Déjà lors du référendum, ils avaient commis des exactions à l’endroit des manifestants dans certains quartiers sud. C’était très grave, mais jusqu’ici personne n’en parlait.
Mondafrique : Votre nom a été cité à plusieurs reprises dans la vidéo mettant en cause le général Mokoko en train de préparer un coup d’Etat au Congo.
Pasteur Ntumi : En ce temps-là, en 2007 le général Mokoko se trouvait hors de Brazzaville, tandis que je me trouvais encore dans le département du Pool. Certainement le général avait pensé à moi pour parvenir à ses fins, mais je n’étais pas en contact avec lui.
Mondafrique : Pour l’opposition, vous semblez être un rempart de poids contre le pouvoir armé de Brazzavile grâce à vos nombreux soutiens du côté des rebelles Ninja.
Pasteur Ntumi : Je ne le suis pas seulement pour les opposants. Je souhaite l’être pour le peuple congolais tout entier qui souffre. Le peuple réclame un changement. Malheureusement Denis Sassou Nguesso a volé sa victoire. Nous en appelons à la communauté internationale parce que la situation devient très compliquée.