Le patron de l’armée algérienne, le général Chengriha, s’est rendu dans le plus grand secret à Paris, révèlent nos confrères de « Jeune Afrique ». Ce que le ministère algérien de la Défense a démenti mardi en fin de journée. Une certitude, la France et l’Algérie cherchent à finaliser une nouvelle donne sécuritaire au Sahel et en Libye, après l’annonce de la fin de l’opération Barkhane.
Les lecteurs de Mondafrique ne seront pas surpris. Ils ont été informés ces derniers mois à plusieurs reprises que des tractations entre la France et l’Algérie étaient engagées pour renforcer leur entente dans la gestion sécuritaire de la région sahélienne, sans oublier le dossier libyen.
Il n’est pas fréquent que le chef d’état-major de l’armée algérienne, le général Saïd Chengriha, se déplace en France. Si tel est le cas, comme l’affirme « Jeune Afrique » c’est que les accords entre Paris et Alger sont passés à une phase opérationnelle. Les affaires sérieuses entre Français et Algériens se traitent entre militaires.Souvenons nous du déplacement récent à Alger du général Lecointre, le chef d’état major de l’armée française reçu au plus haut niveau, alors que les autorités algérienne venaient d’annuler le voyage officiel du Premier ministre français, Jean Castex, et d’une dizaine de ministres, sous un prétexte fallacieux.
L’indulgence de Macron pour Alger
Du coté de Macron et de Le Drian, qui ont ménagé, ces derniers mois, un pouvoir algérien plus répressif que jamais, on veut éviter l’effondrement de l’Afrique sub saharienne après le départ des forces françaises. Or l’Algérie qui possède une des toutes premières armées d’Afrique et qui considère le Sahel comme une zone d’influence privilégiée, est vite apparue comme un partenaire à privilégier.
Macron et Le Drian, après leur retentissant échec à contenir le jihadisme sahélien, transmettent les clés de la lutte anti terroriste dans la région au pouvoir algérien.
Ce qui est hasardeux dans cette alliance qui ne dit pas son nom, c’est de voir les autorités françaises s’allier avec un pays qui a conduit une politique anti-terroriste hasardeuse, opportuniste et d’un total cynisme. Il faut se souvenir qu’Alger a été à l’origine de la montée de la menace terroriste au nord du Mali où elle a laissé s’installer durablement des groupes armés, dirigés par des Émirs d’orignie algérienne et largement instrumentalisés par les services de l’ex DRS. Qu’il s’agisse de Mokhtar Belmokhtar, d »Abdelhamid Abou Zaid ou de bien d’autres.
Plus grave, des rapports très documentés, y compris au sein des services français, ont constaté que l’Algérie protégeait Iyad Ag-Ghali, l’actuel patron de la branche sahélienne d’Al Qaida souvent signalé dans la localité algérienne de Tin Zaouatine, à la frontière du Mali, où résiderait sa famille. Ce chef terroriste a été récemment encore présenté par Emmanuel Macron comme l’ennemi numéro un de la France dans la région.
Du coté algérien, on se prépare à ce tournant diplomatique depuis des mois. Dès novembre 2020, l’Algérie a fait voter une réforme constitutionnelle qui permet aux forces algériennes d’intervenir chez ses voisins, alors que la non intervention militaire en dehors de ses frontières était jusqu’à présent un dogme absolu. Le parlement algérien qui vient d’être élu et qui a vu la victoire de deux partis sous influence, le FLN historique et le MSP « islamiste », devrait ratifier rapidement ce changement à 180 degrés.
Du pain béni pour le pouvoir algérien
Le pouvoir algérien trouve doublement son compte dans ce revirement militaire de taille. L’axe sécuritaire privilégié entre Paris et Alger permet au président Tebboune, un chef d’état sans légitimité qui a été désigné par par l’armée et élu par la fraude, de redorer son blason. Le pouvoir algérien, dont la réputation est minée par une répression féroce et une gestion corrompue, peut ainsi retrouver un semblant de respectabilité internationale. Voici Tebboune, largement dévalué sut le plan intérieur, qui espère une forme de réhabilitation grâce à un soutien français qui ne s’est pas à ce jour démenti.
Avec ce nouvel axe avec Paris, le pouvoir algérien réel, à savoir son armée, retrouve sur sa frontière sud une épaisseur stratégique dont il était nostalgique depuis l’intervention Serval qui vit les troupes françaises intervenir au Nord du Mali en 1993.
On imagine bien que les militaires algériens vont mettre en avant leur volonté de défendre l’intégrité du territoire algérien qui serait menacée par un environnement hostile. L’armée espère-t-elle retrouver ainsi une certaine aura perdue auprès d’une opinion publique restée profondément nationaliste? Sans doute, mais l’exercice sera acrobatique face à un peuple qui ne croit plus aux fables d’autrefois, y compris dans les casernes où le mécontentement est grandissant.