Malgré une situation totalement inconfortable créée par le coup d’Etat du fils de l’ancien président, Mahamat Idriss Deby, le Premier Ministre, Albert Pahimi Padacke, semble être un rempart contre la tentation d’un régime autoritaire
Une chronique d’Alain DUPOUY, Président du Club Objectif Afrique Avenir/O2A, dont le Premier ministre tchadien est membre d’honneur
Chacun sait aujourd’hui que l’évènement dramatique survenu en avril ayant entrainé la mort du Président Idriss Déby Itno a provoqué un « coup d’état » , permettant au fils du défunt Président, Mahamat Iriss Déby d’ « hériter » , dans l’empressement , de la position de Chef de l’Etat , sans passer par les processus constitutionnels classiques.
A partir de là , la nomination d’un Premier Ministre, issu du monde politique civil, devenait une sorte de concession faite à la Démocratie , prétextant par ailleurs qu’il fallait une tête militaire à l’Etat pour préserver la sécurité de la zone , du pays , et au-delà .. tout en décidant d’un Conseil de Transition.
La main tendue
Beaucoup d’atouts plaident en faveur d’Albert Pahimi Padacké: sa compétence d’ancien et dernier Premier Ministre du Président Déby, son score honorable à l’élection Présidentielle de 2021 (10.5%) où il finissait second, sa réputation de patriote et d’homme de convictions, son attachement au fonctionnement démocratique de l’Etat et sa démarche de rassembleur objectif des Forces politiques.Albert Pahimi Padacké a composé un gouvernement le plus consensuel possible. Il est vrai que certains leaders de l’opposition n’ont pas osé y figurer pour le moment) , en ne voulant faire penser qu’ils cédaient à l’opportunisme.
C’est vrai que la position du Premier Ministre est inconfortable , d’autant qu’il est , fatalement supervisé , par le Conseil de transition dirigé par les militaires et Mahamat Idris Déby . Il garde néanmoins sa volonté d’agir .
Il est manifestement conscient que les états d’âme n’ont plus leur place , et que sa motivation est totale pour retrouver la stabilité du pays , répondre aux attentes du peuple Tchadien et notamment de sa jeunesse , donc d’envisager ce retour rapide à l’ordre constitutionnel et à la gouvernance démocratique , tout en préservant la sécurité non seulement du Pays mais de celle des pays voisins.
Il restera bien sûr à unifier les forces politiques , et notamment de trouver un accord avec une partie de l’opposition au Président Déby défunt , et notamment les « Transformateurs » dirigés par le courageux et déterminé Succès Masra , qui est incontestablement un dirigeant d’avenir représentant ce renouvellement humain dont l’Afrique , en général , a et aura besoin … et le Tchad en particulier , cette nouvelle génération attendue ..
Au-delà de cette mise en route , le Premier Ministre relève , et c’est heureux , les prises en comptes de certaines instances capitales pour appuyer sa démarche : l’ONU , l’Union Africaine , l’Organisation Internationale de la Francophonie( OIF ) .
L’Union Africaine: du temps au temps
L’Union Africaine (UA°, seulement observatrice , au tout début de l’évènement , en redoutant de devoir suspendre le pays pour prise abusive du pouvoir par le CMT, a préféré se donner un peu de temps et envoyer cette Commission de l’Union Africaine , mené par le Président du Conseil de Paix et de Sécurité , l’Ambassadeur Djiboutien Mohamed Idriss Farah. Cette mission a été validée , bien entendu par le Président de la Commission UA , Moussa Faki Mahamat , et par le Président actuel de l’UA , le Congolais Félix Tshisekedi. Attendons les conclusions ce 8 mai du Conseil de Paix et Sécurité de l’UNionAfricaine.
Enfin , le Premier Ministre Albert Pahimi Padacké devrait recevoir prochainement l’envoyé spécial de l’OIF , le grand Diplomate Mauritanien et ancien Haut fonctionnaire des Nations Unies , Ahmedou Ould Abdallah .
On devine que , visant les stratégies d’apaisement , ces consultations sur place , ces visites , ajoutées à celles des Communautés Economiques Régionales ( CEEAC , CBLT Lac Tchad , CEN- SAD , CEDEAO, et G5 Sahel) vont donner du poids et de l’aisance au rôle du Premier Ministre, dans cette période , dite de transition..
Cela devrait lui éviter , ainsi , d’être trop l’objet de pressions pouvant provenir d’un seul camp , qui serait celui du parti politique de Feu le Président Maréchal , MPS, qui garde , à juste titre son rôle dans le débat , mais qui ne saurait être, pourtant , prépondérant, précisément au nom de cette ambition de retour au processus constitutionnel.
Reste à espérer que rapidement la situation politique s’apaise , et que le pays puisse retrouver un fonctionnement le plus normal possible, notamment sa reprise économique , dans l’intérêt des Tchadiens , vœu exprimé unanimement par ce qu’il est convenu d’appeler la Communauté Internationale.