La Mauritanie est un pays de cocagne et le chômage aurait baissé à 10% en 2013: voici l’état des lieux décrit par le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, dans sa dernière rencontre avec les jeunes de son pays. Rien naturellement sur la pauvreté et la corruption qui gangrènent le pays
Dans le cadre de la pré-campagne de l’élection présidentielle qui doit se tenir en juin et dont le résultat ne fait aucun doute, le dictateur ami de la France, Mohamed Ould Abdel Aziz, a fait bilan de son premier mandat, placé sous le signe de la lutte contre la pauvreté et la corruption. Une grande discussion avec « les jeunes » a été retransmise en direct par toutes les chaînes TV du pays. Après avoir été le président des pauvres en 2009, notre ami Aziz veut aujourd’hui encore incarner l’avenir en tant que président des jeunes.
Malgré le filtrage à l’entrée, le mécontentement général qui règne dans le pays s’est exprimé dans la bouche de certains jeunes très en colère, mais ce que l’AFP et l’opinion internationale ont retenu de la soirée, ce sont les « statistiques » dispensées par le raïs mauritanien, et en particulier la sortie de la Mauritanie des 50 pays les moins avancés, ainsi que la baisse du chômage à 10% en 2013…
En queue de peloton
Au sujet de la sortie de la Mauritanie des 50 Pays les Moins Avancés (PMA), le président mauritanien se fonde sur la statistique unique du PIB/habitant, qui est depuis trois ans très légèrement supérieur à 1000 USD/mois. Ce critère qui permettrait à la Mauritanie de rejoindre de justesse le groupe des pays à revenu intermédiaire est-il pertinent? Non, pas vraiment puisque le classement officiel des P.M.A, établi en fin d’année par l’UNCTAD (United Nations Conference on Trade and Development), classait fin 2013 la Mauritanie dans la liste des PMA.
Par ailleurs, dans tous les classements internationaux, qu’il s’agisse de développement humain, des « 20 pays les plus misérables » de la planète (un classement établi par Arthur Orkum sur la base des CIA factbooks) ou de corruption, climat des affaires… quels que soient les critères socio-économiques retenus, la Mauritanie figure toujours dans la liste des 20 ou 30 pays les plus mal classés. Aziz a donc utilisé la croissance bien réelle du PIB mauritanien, dopée par les exportations minières et dont les fruits sont confisqués par les membres de son clan, pour à nouveau « se moquer du peuple » et asséner une nouvelle contre-vérité…
Au Royaume du père Ubu
Concernant la baisse du chômage de 30 à 10%, tout le monde se demande à Nouakchott d’où le président Aziz tire ce chiffre… Dans un contexte mondial de reprise faible de la création d’emploi et alors que l’Espagne par exemple est à plus de 20%, la Mauritanie aurait réussi l’exploit de diviser par trois le chiffre en un an (de 30% à 10%).
« Insensé », ont rappelé de nombreux jeunes présents, citadins et éduqués, mais sans emploi, qui se sont exprimés dans des tribunes publiées sur Internet. La démocratie d’opérette, façon Aziz, est sauvée du ridicule par l’espace d’expression que représentent les réseaux sociaux.