La montée des tensions socio-politiques appelle plus à la nécessité d’un discours d’apaisement qu’à une surenchère guerrière qui risque de conduire le Niger dans une impasse politique.
Dans un pays qui aspire à s’acheminer vers une gouvernance répondant aux attentes d’une population dont les besoins de base ne sont pas encore satisfaits, la classe politique devrait faire preuve de plus de réalisme et de retenue dans sa pratique et aussi dans l’exercice de la confrontation démocratique.
Le climat politique ne cesse de se détériorer au Niger. La tension suscitée par la dernière loi de finances n’est pourtant finalement que l’expression d’un malaise général que la classe politique ne parvient pas à surmonter. Pouvoir et opposition demeurant figés dans une confrontation dont le pays se passerait bien en ces périodes d’incertitudes !
De plus, les manifestations de rue ne sauraient constituer un élément de légitimation d’une action politique mise à mal par certains comportements arrogants. Des comportements mal perçus qui entretiennent une tension dont le pays n’a, à l’évidence, nul besoin en ce moment. Plusieurs voix tentent ainsi de s’élever pour appeler à l’apaisement et à plus de pragmatisme dans la gestion des affaires de l’Etat par ces temps troublés.
Le président de la République se doit certes, en tant que premier magistrat du pays, de respecter et de veiller au respect de la Constitution, mais il est aussi et avant tout le garant de la cohésion nationale et de l’unité du pays. Par conséquent, il lui appartient de trouver le meilleur usage des outils constitutionnels dont il dispose pour assurer la quiétude et la paix au Niger afin de mettre toutes les potentialités du pays en situation de faire face aux défis du moment.
Aujourd’hui, ni le pouvoir en place ni son opposition politique ne sont en mesure de gagner ce bras de fer dans un pays qui n’arrive plus à assurer sa sécurité et qui ne dispose pas des moyens nécessaires à un fonctionnement normal de ses institutions. Il y a donc urgence à calmer les ardeurs des uns et des autres pour penser d’abord à l’intérêt du pays.
La classe politique devrait prendre la mesure de la situation réelle du pays et cesser l’actuelle guéguerre qui mine de plus en plus les fondements de celui-ci. Le Niger ne peut plus se permettre le luxe d’une crispation partisane qui pourrait avoir pour conséquence de cristalliser l’attention de l’opinion sur des considérations très secondaires au regard des besoins de la population. Une population qui se sent de plus en plus prise en otage pour des raisons très éloignées de ses intérêts propres. Dans une situation géopolitique et socio-économique similaire, certains pays auraient déjà appelé à la formation d’un gouvernement d’union nationale, seul capable de concentrer son action sur les urgences du moment.
Le Niger s’enfonce dans le désordre et le chaos aussi parce que les perspectives politiques ne rassurent plus. Le président Issoufou Mahamadou est confronté de toute évidence à une situation qui ne devrait pas être… acquise. Après avoir su construire des coalitions de pouvoir pendant ses deux mandats, il lui reviendra de continuer à la consolidation de l’esprit démocratique dans des conditions sécuritaires et socio-économique inédites.
Les actions de la société civile et de l’opposition politique se sont de plus en plus étendues à l’ensemble du pays. Elles risquent de se durcir si les autorités nationales n’adoptent pas une attitude plus mesurée dans la gestion de ce mécontentement. Il y a lieu ainsi d’éviter une escalade qui risque d’atteindre très rapidement un point de non-retour.
Dans ces conditions, il pourrait être de plus en plus difficile de persister à solliciter la solidarité de la communauté internationale sans que cette dernière ne mette davantage son nez dans les affaires du pays et ne soit tentée de limiter les dégâts. Il ne semble donc pas exagéré de penser que la classe politique actuelle brille par une curieuse insouciance. Une insouciance qui tranche terriblement avec l’urgence d’une situation sécuritaire et économique qui se dégrade inexorablement.
Abdoulahi ATTAYOUB Lyon, 18 mars 2018