Du 8 juillet au 12 août 2025, le Festival International de Hammamet revient sur la scène du Centre Culturel International. Musique, théâtre, danse et poésie s’y entremêlent, dans une Tunisie marquée par la transition mais fidèle à sa tradition artistique.

Perché au-dessus des vagues, au cœur d’un jardin d’eucalyptus, l’amphithéâtre du Centre Culturel International de Hammamet est bien plus qu’un lieu. C’est un geste architectural tourné vers la Méditerranée, une main tendue au dialogue, un bastion discret de la culture tunisienne. Depuis 1964, le Festival International de Hammamet y célèbre chaque été les arts vivants avec une élégance discrète et une programmation exigeante. En 2025, il se tiendra du 8 juillet au 12 août, et s’annonce comme un souffle de respiration dans une Tunisie en mutation, ballotée entre incertitude politique et soif d’expression.
La 57e édition de ce rendez-vous estival continue de miser sur la diversité des formes : théâtre d’auteur, concerts acoustiques, chorégraphies contemporaines, lectures poétiques, et rencontres transdisciplinaires. Ce qui distingue Hammamet des autres festivals du Maghreb, ce n’est pas l’ampleur des foules ou l’exubérance des scènes, mais l’intimité, le respect du texte, la fidélité au geste. Ici, la mer n’est pas une toile de fond, elle est un partenaire de jeu. Le vent du soir, les cigales et les silences font partie intégrante du spectacle.
Albert Memmi, enfant de la Médina
L’édition 2025 rendra un hommage particulier à l’écrivain Albert Memmi, enfant de la médina de Tunis et penseur du double exil, disparu il y a cinq ans. Une lecture scénique de « La Statue de sel » par l’acteur Sami Bouajila ouvrira la saison, suivie d’une création musicale autour de ses textes par le compositeur Zied Zouari. L’ombre bienveillante de la pensée décoloniale planera sur l’ensemble du programme, sans jamais devenir pesante.
Le théâtre sera représenté cette année par la Compagnie El Teatro, avec une relecture arabe de Médée signée Fadhel Jaïbi. Sur scène, la comédienne Ghalia Benali interprétera une Médée contemporaine, entre chant guttural et cri maternel, dans une performance saluée au Festival d’Avignon Off.
Charbel Rouhana, aux frontières du jazz
La musique, elle, sera portée par des figures fidèles au lieu : le chanteur libanais Charbel Rouhana viendra présenter un répertoire inédit de oud aux frontières du jazz, tandis que la Soudanaise Alsarah & the Nubatones donnera un concert afro-électro aux rythmes de transe urbaine. L’Algérien Sofiane Saïdi proposera un set raï digital, et la chanteuse tunisienne Emel Mathlouthi reviendra, le 2 août, pour une soirée attendue mêlant ses nouveaux titres et ses hymnes engagés. Ce moment s’annonce particulièrement symbolique : l’artiste, exilée entre New York et Paris, retrouvera pour la première fois depuis dix ans le public tunisien qui l’avait érigée en icône pendant la Révolution de 2011.
À Hammamet, la scène ne s’arrête pas aux gradins. Chaque matin, des ateliers sont proposés : écriture, marionnette, création sonore, photographie documentaire. Des rencontres avec les artistes ont lieu sous les pins, à l’ombre du café littéraire. Le festival s’adresse à un public large, mais refuse la vulgarisation. Il s’adresse autant aux familles en vacances qu’aux jeunes comédiens en formation, aux retraités mélomanes qu’aux militants culturels. Son équilibre repose sur une alchimie rare : ancrage local, ouverture internationale, liberté de ton.
La voix d’Hammamet

Dans une Tunisie traversée par les tensions — chômage des jeunes, durcissement sécuritaire, pressions sur les libertés d’expression — Hammamet résiste, à sa manière. Sans slogans, sans effets, mais avec constance. Il offre chaque été une scène à ceux qu’on entend peu : femmes poètes du Sud, collectifs queer, artistes du rural, jeunes de la diaspora. Il ne prétend pas révolutionner le pays, mais le réconcilier avec lui-même, en douceur. Loin des festivals massifs et des programmations tapageuses, il est un luxe fragile, une oasis culturelle à défendre.
Cette année encore, les soirs de juillet et d’août verront le public se presser sur les gradins, un coussin à la main, les yeux tournés vers la mer, le cœur un peu suspendu. Le théâtre, la danse, la parole reviendront. Et avec elles, une forme de dignité tranquille. Hammamet n’élève pas la voix : il la fait entendre.
Informations pratiques :
Dates : du 8 juillet au 12 août 2025
Lieu : Centre Culturel International de Hammamet, Tunisie
Accès : 1h de route depuis Tunis – transports collectifs ou taxis recommandés
Billetterie : sur place ou via le site officiel festivaldehammamet.com
Entrée : billetterie variable selon les spectacles, certains événements gratuits
Langues : arabe, français, anglais selon les performances – programme bilingue
Hébergement : hôtels à Hammamet, auberges partenaires à tarif réduit