L’embuscade terroriste au Niger, le mercredi 4 octobre, témoigne des terribles difficultés des pays du Sahel à organiser leur propre sécurité. Un signal d’alarme pour les Français qui espèrent retirer l’essentiel de leurs troupes de la région.
L’embuscade tendue mercredi dernier par des groupes armés à des forces nigériennes et américaines à la frontière malienne et au cours de laquelle quatre soldats américains et quatre soldats nigériens ont été tués, présage d’importantes difficultés pour la lutte contre ces djihadistes ralliés à Daech. Le renforcement de la présence armée des cinq pays du Sahel dans cette région n’a pas changé la donne à la frontière entre le Niger et le Mali. En toute urgence, plusieurs détachements de militaires français de la mission « Barkhane » -4500 soldats français surplace et au moins cinq fois plus mobilisés au total avec les rotations nécessaires- ont du gagner le Niger.
Plus grave, souligne l’excellent site mauritanien Sahara Media, cette opération fait partie des multiples attaques commises par ces groupes contre les forces nigériennes, mais aussi burkinabaises et maliennes. Inquiets, les européens s’interrogent sur la capacité des pays de la région à assurer eux mêmes leur sécurité.
Le difficile passage de relais
Les Américains, plus discrets, sont présents dans une base à Agadès, au nord du Niger, avec des encadreurs mais aussi des forces spéciales estimées par certaines sources locales à des centaines.
Les soldats français et américains forment par ailleurs les soldats des pays de la région afin d’améliorer leurs compétences, avec l’espoir de se désengager peu à peu.
Autre forces présentes sur place, celles des nations unies avec près de 10.000 hommes.
et la force commune des cinq pays du Sahel, dits du G5 (la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso, le Niger et le Tchad).
Dans une récente déclaration, le chef de l’état malien, Ibrahim Boubacar Keita, a affirmé que la force commune du Sahel prouvera son efficacité dans un proche avenir, car a-t-il dit « nous nous sommes rendus compte que notre défense et notre sécurité sont des exigences et des devoirs qui nous incombent nous-mêmes ».
Le ministre français des affaires étrangères, Jean Yves Le Drian, avait déclaré cette semaine qu’il était convaincu que « la constitution de la force commune au Sahel était la réponse appropriée aux questions sécuritaires ».
Une politique de sanctuarisation
Une source sécuritaire occidentale qui a souhaité garder l’anonymat, a battu en brèche cette affirmation, précisant qu’à l’exception de quelques unités, les soldats de ces pays sont encore incapables de lancer des attaques contre les groupes armés.
Cette source a ajouté, qu’à l’exception du Tchad, le mieux que ces pays peuvent faire, c’est déployer des militaires pour sécuriser les bases et les centres et pas davantage.
Ce serait mieux que rien, ajoute la source, car cela va permettre de libérer certaines unités qui participeront aux attaques planifiées contre les groupes armés.
L’appel aux financements
En septembre dernier le président nigérien Mouhamedou Issoufou avait appelé la communauté internationale à se mobiliser pour aider la force commune des pays du Sahel en lui offrant les moyens nécessaires à achever sa mission, eu égard à la faiblesse des moyens des pays concernés.
Par ailleurs, Lassana Diarra, l’auteur du livre « les pays de la CEDEAO face au terrorisme transfrontalier » écrivait que le discours politique existe, mais il manque une volonté réelle de coopération effective.
Lassana Diarra révèle un manque de confiance entre certains pays, citant pour l’exemple les relations suspectes qu’entretenait l’ancien président du Burkina Faso, Blaise Compaoré avec les groupes islamistes extrémistes qui avait protégé son pays jusqu’ à sa chute, ce qui cultive la méfiance chez le voisin malien.
Autre importante brèche dans la lutte contre les groupes terroristes, celle du renseignement. Malgré l’utilisation de l’aviation et la surveillance électronique, le renseignement humain reste primordial selon l’auteur du livre.
Forces d’occupation
L’auteur du livre ajoute par ailleurs que les forces occidentales sont toujours considérées comme des forces d’occupation venues s’accaparer les richesses minières des pays et protéger leurs intérêts.
La source militaire occidentale est allée dans le même sens, révélant que les soldats au Mali, au Niger et au Burkina Faso sont en majorité originaires de différentes tribus du nord, différentes de celles du sud et ne souhaitent pas s’aventurer dans des zones qu’ils ignorent, d’autant que les populations locales témoignent à leur endroit méfiance et même hostilité.
Dans les zones pauvres généralement délaissée par le pouvoir central, le message des groupes armés passe bien et recueille des échos favorables.
Les groupes armés disposent également de grandes capacités en matière de renseignements humains très efficaces, et la récente embuscade en est une preuve éloquente.