Alioune Tine, 75 ans, expert indépendant des Nations Unies et personnalité influente en Afrique, appelle les autorités sécuritaires du Sénégal à procéder à un traitement égalitaire de tous les actes de violence survenus depuis le début de la campagne électorale.
Les incidents notés en ouverture de la campagne électorale des législatives anticipées inquiètent Alioune Tine, fondateur du Think Tank AfrikaJom et ancien expert indépendant des Nations Unies pour le Mali.
Militant des droits de l’homme, M. Tine a largement contribué à la libération des prisonniers politiques dans son pays et d’Ousmane Sonko en particulier. Ce dernier, nommé Premier ministre à l’issue de l’élection de Bassirou Diomaye Faye, conduit la coalition Pastef aux législatives du 17 novembre prochain.
Devant la recrudescence des actes de violences, Alioune Tine invite le gouvernement à assurer la sécurité des populations en formalisant l’enquête judiciaire pour tous les actes de violences. En effet, la tête de liste du parti au pouvoir à Dakar, Abass Fall, n’a toujours pas été auditionné par la gendarmerie alors que son appel à la violence avait conduit au saccage du siège d’une des coalitions de l’opposition.
Selon la presse locale, la gendarmerie n’avait pas encore réussi à joindre l’intéressé pour lui remettre une convocation. Pendant ce temps, Bougane Gueye Dany, un homme d’affaires membre de la coalition F4, opposition, arrêté pour refus d’obtempérer, rébellion et outrage à agent dans l’exercice de ses fonctions était en détention préventive depuis le 19 octobre dernier. Son procès qui a eu lieu mercredi à Dakar s’est finalement soldé par une condamnation à un an de prison avec sursis, ce qui lui a permis d’être libéré.
Des populations à rassurer
Pour Alioune Tine, les ministres de la justice et de l’intérieur qui sont les seules compétentes en la matière doivent « montrer leur efficacité et leur impartialité », dit-il. « C’est le moment de montrer leur capacité à rassurer la société. Autrement, tous ceux qui appellent à la violence doivent au moins faire l’objet d’une audition par la justice. Tous les actes de violence doivent faire l’objet d’une enquête judiciaire pour en tirer toutes les conséquences », a-t-il écrit sur son X.
Car la récurrence des actes de violences électorales met petit à petit en échec « la démocratie sénégalaise » et rend le pouvoir « impuissance (…) à gouverner ce pays », a-t-il prévenu.
Au surplus, ces « logiques électoralistes et pouvoiristes qui sont en marche depuis quelques années « mettent à mal le pacte républicain que le président de la République Diomaye Faye appelle sans pouvoir se faire entendre malheureusement », constate-t-il. C’est pourquoi il invité également les chefs religieux à réagir « maintenant », car « nous vivons le signal de l’effondrement, de l’éducation et de la culture, l’effondrement du civisme et du patriotisme », a-t-il conclu.
Un face à face pour apaiser le climat
Au Sénégal, la campagne pour les élections législatives anticipées pourrait prendre une autre dimension avec le face-à-face public auquel l’ex-Premier ministre de Macky Sall et son successeur Ousmane Sonko promettent de se livrer. Un proche de l’ancien Premier ministre Amadou Ba a en effet déclaré que ce dernier est d’accord pour se mesurer à l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko lors d’un débat public. Mais pas à la date du 15 novembre proposée par M. Sonko.
La tenue d’un tel face-à-face donnerait du relief à une campagne électorale réduite pour l’instant à des invectives. Le ton était d’ailleurs vite monté dès l’ouverture de la campagne, le dimanche 27 octobre. Ce jour-là, le convoi d’Abass Fall, tête de liste de la coalition formée par Pastef, le parti au pouvoir, avait été attaqué à coup de gourdins. En réponse, le candidat du pouvoir avait convié ses militants à « s’armer de couteaux et de machettes pour apporter la riposte » et, dans la foulée, le siège de la coalition de l’opposition, Samm Sa Kaddu, avait été saccagé.
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