Beaucoup de Gazaouis ne pleurent pas la dispartition de Yahya Sinwar

La mort de Yahya Sinwar ne semble pas avoir été vécu par beaucoup de Gazaouis comme une mauvaise de nouvelle de plus après un an de pilonnage incessant de leur étroite bande de territoire par l’armée israélienne.
 
 
Un certain nombre d’habitants de Gaza cités par le média « The New Arab » (TNA) ainsi que dans un article du  « New York Times »,  ont exprimé sans ambages leur soulagement et leurs espoirs au lendemain de la mort du chef du Hamas, tué par des soldats israéliens dans le sud de la bande de Gaza dans la nuit du 16 au 17 octobre.
 
Pour Sami Abdallah, par exemple, l’assassinat de Sinwar est même une bonne nouvelle et il a exprimé sa satisfaction en apprenant la mort du leader palestinien : « Je ne suis pas contre le Hamas, mais je suis contre Sinwar, parce qu’il n’a pas pensé à notre peuple » [en déclenchant les massacres du 7 octobre 2023 en Israël] », a-t-il confié aux journalistes de TNA.
 
Cette réaction illustre la grande lassitude de nombres d’habitants de Gaza. Tous ne sont pas des partisans du Hamas, loin s’en faut. Même ceux qui ont pu voir dans le mouvement de la « Résistance islamique » l’incarnation de la dernière ligne de défense contre Israël ne pardonnent pas aux leaders du Hamas d’avoir provoqué le feu vengeur de l’Etat hébreu en attaquant les Kibboutz israéliens, faisant 1200 morts dont une grande partie de civils. La destruction quasi totale de Gaza et la mort de 42000 personnes, dont une majorité de femmes et d’enfants, a été l’insoutenable prix à payer pour les Gazaouis.
 

« Le boucher de Khan Younès »

 
« Quand j’ai appris la mort de Yahya Sinwar, ma première réaction a été le soulagement et l’espoir qu’un cessez le feu soit enfin conclu », a déclaré Shorouq Abu Hamad au New York Times, le 18 octobre. Depuis, il est clair que les espoirs de cette jeune femme de 22 ans, dont l’un des frères a été tué par les bombardements israéliens et un autre amputé des deux jambes, étaient vains. Les attaques israéliennes continuent, les frappes redoublent de plus belle. Samedi, des dizaines de personnes ont été tuées dans le nord de Gaza, à Beit Lahiya. 
 
Résidente de la ville de Khan Younès, le lieu de naissance de Yahya Sinwar, Shorouq Abu Hamad ajoutait en tout cas, au lendemain de la mort de Sinwar,  que nombre de ses voisins pensaient comme elle. Yahya Sinwar est celui qui  » a causé une telle tragédie à la population de Gaza : il  a été l’homme qui a planifié tout cela [ les attaques du 7 octobre] et sa mort est le résultat logique [de ses décisions.] » 
 
Selon Khaled abu Jarad, un autre résident interviewé par le New York Times, qui figure au nombre de centaines de milliers de personnes déplacées par les combats, seuls les plus extrémistes supporters du Hamas ont pris le deuil de la mort du leader : Sinwar était connu pour sa brutalité envers les Palestiniens soupçonnés d’espionner pour Israël, et Khaled rappelle que le chef du Hamas avait été baptisé par ses adversaires le « boucher de Khan Younès ».
 
A ses côtés, dans le camp de déplacés où il vit, un jeune homme de 19 ans, Saher Abdul Ghafour, émet le vœux que « le prochain leader du Hamas soit une personne plus diplomatique et sage afin que cette guerre puisse se terminer grâce à des négociations ». Comme la plupart des gens ont tout perdu, estime un autre Gazaoui, l’étudiant Ahmed Awad, 21 ans, la majorité des gens n’iront pas pleurer la mort de Sinwar. Et d’ailleurs, s’interroge-t-il, « maintenant qu’il n’est plus là, on va voir très vite ce qu’il a laissé derrière lui en héritage »…