Avec quatorze titres de champion et six Coupes d’Afrique, la Jeunesse Sportive de Kabylie (JS Kabylie) présente le palmarès le plus riche du football algérien. Le club basé à Tizi Ouzou a pourtant dû se battre pour éviter la relégation en Ligue 2. Djilali Bahloul, l’entraîneur responsable de son sauvetage, nous en dit davantage sur ce club singulier.
Un article de Patrick Juillard
Ses nombreux supporters respirent. Pour la deuxième saison consécutive, la Jeunesse Sportive de Kabylie, leur JSK chérie, a assuré son maintien en Ligue 1. Appelé à la barre dans la dernière ligne droite en remplacement du chevronné Azzedine Aït Djoudi, Djilali Bahloul (42 ans) a mené à bien cette opération qui n‘était pas gagnée d’avance, réussissant une série de neuf matchs sans défaite. « Mon plus beau souvenir ? Ce match contre l’USM Alger (2-2, le 6 mai dernier, ndlr), et la communion entre le public et les joueurs à la fin de la rencontre. Cela scellait la réconciliation entre les supporters et les joueurs. Avoir vécu ces moments-là à la tête de la JSK restera gravé à vie en moi. C’est certainement ma plus belle expérience en club dans ma carrière jusqu’alors », confie à Mondafrique ce binational de 42 ans, grand voyageur passé par le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Rwanda, Bahreïn, Oman, l’Arabie Saoudite ou encore la Turquie.
Un pont entre les générations
Le sauveur des Canaris de la Djurdjura, autre surnom du club dû à ses couleurs jaune et vert, raconte à propos du prestige de la JSK une anecdote révélatrice. « Nous étions partis à la montagne avec les membres de mon staff lors d’une journée de repos. Nous voulions faire une promenade dans l’arrière-pays de Tizi Ouzou. Nous avons été accueillis chaleureusement par les villageois. Une dame de 90 ans m’a particulièrement marqué. Elle m’a raconté l’histoire de la JSK, avec la victoire en Ligue des Champions africaine en 1990. Elle m’a pratiquement donné la composition de l’équipe. C’était extraordinaire », se rappelle-t-il, ému.
Au-delà de son ancrage local, qui fait du club un phare identitaire à l’image du FC Barcelone en Catalogne, au-delà de la ferveur de ses supporters, aussi fervents qu’exigeants, la JS Kabylie tire sa popularité de cette mémoire transmise à travers les générations. Avec pour les Franco-Algériens une période charnière : celle de la décennie noire, durant laquelle le club brilla et fit office de valeur refuge. « La JSK nous a fait rêver dans les moments difficiles traversés par le pays à la fin des années 1990 », nous dit Djilali Bahloul.
Nouveau stade, nouvel actionnaire, nouvelle ère ?
De saisons de transition en brèves embellies, la JS Kabylie connaît des hauts et des bas depuis une bonne décennie et la fin de l’ère Mohand Hannachi. Président de 1993 à 2017, décédé en 2020, ce dirigeant de caractère demeure une figure tutélaire parfois encombrante pour ceux qui lui ont succédé. « Peut-être qu’il fallait passer par des moments de vide pour mieux revenir ? J’espère que ces moments se terminent et que la JSK va redevenir le grand club du passé… », parie Djilali Bahloul, confiant en la restructuration lancée dans la foulée du rachat du club par l’opérateur téléphonique public Mobilis au mois de mars 2023, et l’inauguration annoncée (et plusieurs fois repoussée) d’un nouveau stade de 50.000 places.
« Une nouvelle dynamique est enclenchée. Je suis pratiquement sûr qu’elle va être positive, estime Djilali Bahloul. Tous les ingrédients sont réunis pour que la JSK joue de nouveau les premiers rôles. Ce qui signifie exister sur le plan local, gagner des titres et redevenir le grand club africain qu’elle a été par le passé. » Tout un public, tout un peuple, tout un pays n’attend que cela.