Bernard Cazeneuve en quête de « bons » musulmans

A la tète du ministère français de l’Intérieur et ….des cultes, Bernard Cazeneuve accueille, le lundi 15 juin, cent cinquante musulmans triés sur le volet. L’intégration est en marche !

CazeneuveAprès l’échec depuis un quart de siècle, de toutes les tentatives des ministres de l’Intérieur successifs d’organiser l’islam de France, Bernard Cazeneuve ne se décourage pas. Lundi 15 juin, cent cinquante représentants de l’Islam se retrouvent place Beauvau en compagnie du ministre de l’Intérieur et du Premier ministre, Manuel Valls: des associatifs, des imams, des théologiens et pour un tiers, des représentants du défunt Conseil français du culte musulman (CFCM) créé par Nicolas Sarkozy, dont tout le monde s’accorde à constater l’échec absolu. Ce n’est pas grave, on prend les mêmes et on recommence, mais sous une autre forme.

Une coquille vide

Personne ne sait très bien comment ces heureux « représentants » d’un jour ont été choisis par les Préfectures, ni exactement de quoi ils vont s’entretenir après avoir été répartis dans des « ateliers » consacrés aux « pratiques rituelles », à la « gestion des lieux de culte » et à la lutte« lutte contre les actes anti musulmans ». Vaste programme torché donc en une journée à peine. Tout cela n’a d’ailleurs guère d’importance, puisque le ministère de l’Intérieur annonce benoitement que « la nouvelle instance n’aura aucun pouvoir ». Mais qu’on se rassure, un conseiller du ministre a assuré au Monde qu’il n’y avait « aucun salafiste déclaré ». On respire.

S’ils sont dociles et bien élevés, ces « vrais » gens seront conviés une ou deux fois par an place Beauvau. On va bientôt regretter le CFCM qui au moins avait un semblant de représentativité et d’influence

En quête d’électeurs

Une certitude, le ministère de l’Intérieur français qui est aussi celui des cultes par une bizarrerie historique, est totalement désemparé. Après l’électrochoc des attentats de janvier, la réponse du gouvernement de Manuel Valls fut avait tout sécuritaire. Mais en six mois, la perspective des élections présidentielles s’est imposée à l’Elysée. Dans la foulée, les bons élèves du gouvernement, type Cazeneuve, font du zèle pour ramener les brebis musulmanes égarées dans le giron du Pouvoir Socialiste.

En 2012, les communautés issues de l’immigration maghrébine avaient voté massivement pour François Hollande, après la campagne d’extrême droit menée par son adversaire Nicolas Sarkozy. Il s’agit qu’en 2017, que cet électorat soit au rendez vous. Et ce n’est pas gagné, quand on constate combien les banlieues ont peu adhéré à « l’esprit du 11 janvier » sanctifié par les sociaistes au pouvoir !

Du grand guignol

Avant la convocation, lundi 15 juin, de cette grand messe juste inutile, Bernard Cazeneuve avait invité en mai, à deux reprises, les représentants des médias dit « communautaires » comme Beur FM, Radio Orient, Atlas Info, Oumma . Une première chez des socialistes qui se gargarisent de laicité et dénoncent en toute occasion le péril du communautarisme! Lors de la première rencontre, le ministre, très cordial, avait discuté « de tout et de rien », selon un participant. Mais lors du second rendez vous, on est passé à la vitesse supérieure. Chaque média était invité à venir accompagné de « quatre musulmans » prêts à serrer la main du ministre. L’intégration était en marche. Quelques représentants de la presse (Le Monde et l’AFP) étaient présents et les caméras invitées.Les Musulmans existent, ils ne mordent pas, le ministre socialiste de l’Intérieur les a rencontrés. Entre café du commerce et opération de communication.A moins que  la République n’aie  réhabilité une sorte de « bureau des affaires musulmanes », du genre de celui qui sévissait à Alger à  la belle époque coloniale.

L’enjeu des relations entre l’Etat et le deuxième culte en France est trop décisif pour rire de ces rencontres de sous préfecture. L’amateurisme de messieurs Valls et Cazeneuve est  juste terrifiant…

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Nicolas Beau
Ancien du Monde, de Libération et du Canard Enchainé, Nicolas Beau a été directeur de la rédaction de Bakchich. Il est professeur associé à l'Institut Maghreb (Paris 8) et l'auteur de plusieurs livres: "Les beurgeois de la République" (Le Seuil) "La maison Pasqua"(Plon), "BHL, une imposture française" (Les Arènes), "Le vilain petit Qatar" (Fayard avec Jacques Marie Bourget), "La régente de Carthage" (La Découverte, avec Catherine Graciet) et "Notre ami Ben Ali" (La Découverte, avec Jean Pierre Tuquoi)