Saïd, le Régent de Zéralda (II épisode)

Voici le deuxième épisode du vrai faux journal intime de Said Bouteflika, le frère du président algérien malade et diminué. Dans l’ombre, cet ambitieux est devenu le véritable patron de l’Algérie. Grace à ses réseaux discrets et puissants, le site Mondafrique s’est procuré le deuxième épisode de son journal intime

SaidZéralda, le 19 juin

« Quand je vois autour de moi, ces généraux galonnés, ces hommes d’affaires qui puent l’oseille et ces pseudos commis de l’Etat me faire courbette et ne pas oser la moindre contradiction, je suis pris d’un haut le cœur de mépris et de dégoût de tout ce monde de fourbes. Ils sont abjects. Je sais qu’au moindre accroc ils seront les premiers à me marcher dessus.

J’étais, à la fois, témoin et victime de ce retournement de veste. C’était en 1981 quand mon frère Abdelaziz tombait en disgrâce. Nous avons été lâchés par tout le monde. Même quand nos affaires ont été jetées à la rue par ce sinistre Messaoudi Zitouni dont le sobriquet « pneu Michelin », lui va comme un gant, personne n’avait compati avec nous, ne serait-ce que du bout des lèvres. Ces tristes souvenirs sont restés gravés dans ma mémoire. Pour fuir, la furia des revanchards qui ne demandaient qu’à brûler vif l’ancien ministre des affaires étrangères de Boumediene qu’était mon cher frère Abdelaziz, j’ai eu pour seule planche de salut une minable bourse d’études en France qui me permettait juste de survivre. Ma sœur Latifa, restée à Alger poursuivre ses études en chirurgie dentaire à la faculté de médecine me racontait des choses horribles.

La publication dans le quotidien El-Moudjahid du 9 août 1983, de l’arrêt de la cour des comptes  faisant ressortir « le détournement de la somme de 58.868.679,81 DA soit l’équivalent, de 600. 000 Euros » commis par mon frère quand il était ministre des affaires étrangères, avait constitué le coup de massue pour toute la famille. Nous étions frappés par l’infamante étiquette de « voleurs de biens du peuple ». Pourtant, mon frère n’avait pas tout pris. Il avait rapatrié 12.212.875,81 DA comme indiqué dans le même arrêt et confirmé quelques années plus tard par le président Chadli Benjedid au directeur du quotidien « Le Matin », Mohamed Benchicou, ce journaliste haineux qui ne nous a jamais portés dans son cœur.

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Cette histoire de détournement continue de nous poursuivre jusqu’au jour d’aujourd’hui. Et comme l’occasion m’est donnée d’en parler, ne faut-il pas ramener cette histoire de sous à sa véritable dimension ? C’est quoi 600.000 Euros dans le budget d’un Etat pétrolier comme l’Algérie ? Cet argent n’a-t-il pas profité, tout compte fait, à l’un des enfants illustres de l’Algérie. L’homme qui avait porté la voix de l’Algérie partout dans le monde ne méritait-il pas de bénéficier de cette somme pour faire face à ses besoins loin de son pays et de sa famille ? C’est vrai, 600.000 Euros de l’époque est à multiplier par dix aujourd’hui. Toujours est-il, ça reste une somme modeste pour services rendus à un pays de la dimension de l’Algérie.

Que ceux qui nous tiennent rancune pour cette modeste somme jettent un coup d’œil sur les sommes colossales détournées par ceux qui ont appartenu au régime de Chadli et de ses successeurs. Je vois d’ici certaines mauvaises langues me rétorquer que mon frère a été le premier à ouvrir le bal des détournements des deniers publics. A ceux là, même s’ils ne méritent que le mépris et l’arrogance, je tiens tout de même à rappeler que « Si Abdelaziz » méritait plus que ça, lui qui s’était jeté dans les bras de la révolution alors qu’il était âgé à peine d’une vingtaine d’années.

Au Maroc, nous ne manquions de rien. Considérés comme sujets français, nous étions des privilégiés. Mon père Si Ahmed, paix à son âme, était le maître absolu du marché de gros de la ville d’Oujda. En plus de son salaire, il bénéficiait de substantiels pourboires que lui glissaient les mandataires pour avoir des places de choix sur le marché. C’était suffisant pour nourrir ses enfants, leur assurer une bonne scolarité et acheter des biens pour laisser sa famille à l’abri du besoin.

A sa mort, il nous a légués des biens répartis sur près de 600 m2 à Oujda. Les titres existent à ce jour et  nous en tirons toujours profit. Le premier bien appelé « Tahenia » d’une superficie de 92 mètres carré est enregistré au nom de mon regretté père. La demande de dépôt d’immatriculation s’est effectuée le 3 avril 1944.

La deuxième propriété nommée « Tafkiria » s’étend sur 241 mètres carré, toujours inscrite au nom de mon défunt père. Et la dernière, répertoriée sous le numéro 6035, appelée « Ouarda 3 » affiche une superficie de 235 mètres carré.

Les titres en question n’ont pas subi d’opération de cession, ni de transfert de propriété. La seule transaction concerne le bien dénommé « Ouarda 3 ». En janvier 1958,  mon père avait réalisé une donation aumônière au profit de ses 5 enfants mineurs dont moi-même. Le benjamin de la famille.

Tout récemment, l’un de nos locataires a cherché à profiter de notre absence du Maroc et surtout de la maladie de mon frère, le président, pour ne pas payer son loyer. J’ai du intervenir, personnellement, pour demander son expulsion des lieux. Malheureusement, ma première requête a été rejetée par le tribunal compétent de la ville d’Oujda. Une deuxième est en cours. Je ne lâcherai pas le morceau. Non pas par cupidité mais par principe. Ces biens nous appartiennent et nous tenons à les garder.

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D’ailleurs, à son retour de France où il a été hospitalisé durant 88 jours, mon frère, pris par je ne sais quelle nostalgie, a insisté pour qu’on l’emmène à Oujda visiter la maison familiale. Il disait vouloir humer l’ai de la terre marocaine qui l’a vu naître. J’ai eu toutes les peines du monde pour pouvoir le ramener à la raison en lui promettant que ça sera bientôt fait dès qu’il récupérera de ses forces. Heureusement, qu’il n’a plus exprimé ce souhait depuis qu’on lui a mis en tête l’idée du quatrième mandat. Sinon, ça aurait été la honte ! Qu’auraient bien pu penser et dire tous ces ennemis  qui se recrutent par milliers depuis la fin du troisième mandat ? Qu’auraient bien pu dire ces salauds qui tiennent à chaque occasion à nous rappeler nos origines marocaines en multipliant les preuves que nos ancêtres n’ont laissé aucune trace à Nedroma d’où nous nous disons originaires.

En voilà encore une ! Après les histoires de la caisse noire du ministère des affaires étrangères, on nous sort celle de nos origines. Comme si être marocain était une tare. Sur ce point, je reconnais que c’est un peu la faute à Abdelaziz. Il était tellement complexé par notre passé marocain qu’il a, durant tout son règne, complexifié les relations de l’Algérie avec le Maroc au point de faire des Marocains les ennemis irréductibles des Algériens. Si jamais j’aurai à lui succéder, la première des choses que je ferai c’est d’œuvrer à mettre en exergue la fraternité algéro-marocaine. Comme ça, je n’aurai plus à souffrir de cette histoire d’origine marocaine. Je rappellerai à tout le monde que les Libyens avaient un roi, Idris 1er, d’origine algérienne. Pourquoi pas un président de la république algérienne d’origine marocaine. D’ailleurs, Ahmed Benbella en était un.

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Ah ! Ce Benbella ! Paix à son âme. C’était un sacré numéro. C’est comme mon frère Abdelaziz. Autant ils étaient les pires ennemis au point où mon frère a été l’un des instigateurs du coup d’Etat du 19 juin 1965 qui envoya à la trappe le premier président de l’Algérie pour un peu plus d’une douzaine d’années, autant, ils sont devenus les meilleurs amis du monde quand mon frère s’empara du palais d’El-Mouradia sur les hauteurs d’Alger. Un palais dont rêvait Ahmed Benbella ne serait-ce que pour un jour. Mais, mon frère était prêt à tout lui céder sauf le palais et son trône.

D’ailleurs, la perte de ce trône signifie ma perte à moi. Eh oui ! En dehors du palais d’El-Mouradia je serai moins que rien. Je n’ai pas le moindre doute sur ce qui m’arriverait si jamais je suis éjecté des arcanes du pouvoir. C’est pour cette raison que je remuerai ciel et terre pour garder le pouvoir non pas jusqu’à la fin des jours de mon frère président mais jusqu’à la fin de mes jours à moi.

Je sais que toute cette faune qui me fait courbette, aujourd’hui, elle sera la première à me poignarder dès que j’aurai quitté le pouvoir. Regardez, à titre d’exemple, ce « Larb », alias Saadani, que j’ai intronisé patron du FLN au moment où il ne s’y attendait guère. Quand je l’invite à s’asseoir, il se met à plat ventre.

Mais, dès que la donne change, il sera le premier à me sauter dessus pour me lacérer le corps de ses griffes.

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Autre exemple de larbin dont il faut se méfier, c’est « Monsieur goudron ». Il était le protégé de « l’intello » de l’armée, le général Touati, un homme de sa région. Dès qu’il a senti le vent tourner il s’est jeté dans mes bras pour me lécher les pompes pour ne pas dire autre chose. Ce mec qui n’avait d’entrepreneur que le nom avec sa brouette et ses pelles et pioches est, aujourd’hui, grâce à moi à la tête d’un empire dont il n’avait jamais rêvé. Patron des patrons des travaux routiers, grand timonier de la presse en ayant sous sa coupe deux quotidiens de la presse écrite et deux chaînes de télévision. Le tout saupoudré d’un grand club de football dont la galerie doit me servir pour toute sorte de manifestation populaire.

Ce petit nabab, œuvre de mes magiques manipulations, a servi à me dresser toute la masse d’opportunistes de sa région réputée pour être frondeuse et récalcitrante. Mais, rien ne garantit qu’il me sera fidèle si demain, par malheur, j’étais jeté. Heureusement, que j’ai pris les devants en mettant main basse sur la moitié de sa fortune. Je ne suis pas si naïf pour faire d’un blédard un milliardaire et me retrouver du jour au lendemain main devant et main derrière. Que Nenni !

Même le somptueux hôtel de Barcelone, il ne lui appartient qu’à moitié. Une moitié qu’il partage avec d’autres larbins dont le fameux « Ahmed le poclain », ce cher  général Kherfi Ahmed qui a été trop bavard au point de faire échouer mon plan qui visait à faire de lui le successeur du général Tewfik quelques mois avant la présidentielle de 2014. Un plan que je dois revoir avec beaucoup de minutie après deux tentatives infructueuses.

C’est ce que je révèlerai dans le prochain épisode de ce journal intime. »