Saïd Bouteflika, le régent de Zéralda

Depuis l’accession de son frère, Abdelaziz Bouteflika, à la présidence algérienne en 1999, Said joue le role de conseiller de l’ombre. Les années passant, le frangin est devenu un des hommes les plus puissants d’Algérie, notamment pour la distribution d’énormes bakchichs sur tous les grands projets publics. En 2013, l’accident vasculaire cérébral qui a relégué le président algérien, totalement impotent, dans le vaste complexe de Zéralda, a transformé son frère Saïd en grand vizir du pays. Grace à des réseaux sophistiqués et secrets, « Mondafrique » a pu se procurer le vrai faux journal intime de « Saïd Bouteflika, le régent de Zéralda ». Décapant

SaidLe 11 juin, Palais de Zéralda

Ce pauvre Laurent Fabius, le valet d’Israel et du Qatar, s’ennuie tellement à Alger qu’il s’est même endormi en pleine réunion officilelle. Le ministre français des Affaires étrangères est reparti de chez nous encore moins populaire qu’il ne l’était en arrivant! Une vraie prouesse.

Déja en décembre 2012, son voyage, peu avant l’intervention française au Mali, avait été un bide. Mon frère lui avait dit: « Je ne peux pas vous empêcher de déclencher une opération militaire ». Visiblement, ce Fabius ne connait pas la langue de bois algérienne, il avait pris cette déclaration pour un encouragement. Revenu à Paris, le voici qui se vante sur la radio « Europe 1 » d’avoir obtenu une autorisation de survoler notre territoire. Mais quel bavard! Quel impudent! Laurent Fabius nous a pris visiblement pour des faire valoir, des carpettes. La France aurait-elle oublié que mon frère, ce mélange admirable entre Coluche et De Gaulle, a toujours défendu un nationalisme pur et dur?

Lorque j’ai effectué, en février dernier à la demande d’Abdelaziz, un rapide séjour à Paris pour vendre l’idée d’un quatrième mandat, je n’ai pas fait le détour par le Quai d’Orsay. Je me suis adressé directement aux représentants des services tricolores et à l’Elysée. Eux au moins sont des pros. J’ai redit aux coordinnateurs des services français qu’on allait les aider à maintenir l’ordre au Mali, s’ils nous laissaient faire notre tambouille interne. Et le pire c’est qu’ils ont cru à mes promesses.

On les aide tellement nos « alliés » français que, le 9 juin, alors que Fabius fait la sieste à Alger, nous avons organisé sans lui une grande réunion des trois grands mouvements de touaregs pour dessiner l’avenir de la région sahélienne, notre zone d’influence qui conditionne la paix sociale dans tout le sud algérien. Les Français devraient bien s’inspirer de « la déclaration d’Alger », que nous avons rendue publique au lieu de cirer les pompes du président malien IBK qui est vendu au Maroc.

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J’ai pourtant vraiment de la compassion pour Laurent Fabius. Moi aussi, je suis un mal aimé, un incompris. Au début du printemps arabe, la rue algérienne m’avait même assimilé à Leila Trabelsi, l’épouse du président Ben Ali qui fit main basse sur la Tunisie. Leila Trabelsi avait été « la Régente à Carthage », je serai, disait-on, « le régent de Zéralda », du nom de la maison médicale qu’occupe mon frère à quelques kilomètres d’Alger et où je suis l’infirmière chef.

« Trabelsi-Saïd » dégage! » Mais quelle impudence! Comment comparer un Bouteflika, appartenant à une grande famille de mandataires de marchés de gros dans l’ouest algérien, à Leila la coiffeuse ? Les Trabelsi, ce sont des gagne petits, des crève la faim, des analphabètes… Bien sûr, Abdellaziz a effectivement raté le concours de postier, mais le reste de la famille est éduqué.

Nous sommes, Abdelaziz et moi, assis sur un tas d’or de plus de deux cent milliards de dollars de réserves. Le cadeau d’entrée dans le clan Bouteflika est à 300 millions de dollars, excusez du peu. Les industriels français venus en masse avec Laurent Fabius ne l’ont pas oublié, ils voulaient passer au tirroir caisse, après nous avoir laissé organiser nos élections présidentielles bidon. Mais le roupillon du ministre a un peu freiné nos ardeurs à signer des contrats

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Moi si timide, frustré, écrasé par mon grand frère, Abdelaziz, chouchou de Boumedienne, élevé dans un gynécée par une mère autoritaire, je n’aurais jamais pu espérer devenir le « Régent de Zéralda », voire d’avantage. Encore faut-il que je me débarasse des deux âmes damnées de l’institution militaire. Le premeir, c’est Tewfik, « le petit muet » de la grande muette, qui est à la tête des services algériens depuis un quart de siècle; le second, c’est  « Sissi imperator », à savoir le vieux Gaid Salah (82 ans), que nous avons gavé, Abdelaziz et moi, en le nommant vice ministre de la Défense, avec quelques marchés publics en prime, mais qui se rève d’un destin à la Sissi, le nouveau président égyptien.

Quel chemin parcouru! A mon arrivée à Paris en 1983, Laurent Fabius, encore lui, était alors le plus jeune Premier ministre que la France ai connu. Et moi, je n’étais plus rien. Les salauds du DRS n’avaient rien laissé à mon frère Abdelaziz après lui avoir ravi la succession de Boumedienne au profit d’un roi fainéant. Chadli nous avait tout pris, y compris la maison familiale à « El Biar », après un rapport du président de la Cour des Comptes, décédé en 1999 d’une crise cardiaque lorsqu’Abdelaziz parvient-enfin!- au pouvoir. On n’a pa eu le temps de lui faire la peau.

Le seul livre que j’ai lu pendant mes années parisiennes où kj’ai étudié l’informatique fut « Paris pas cher ». Je l’avais sans doute volé à un étalage, une seconde nature. Je passais ma vie au « Thermomètre », un bar décati de la place de la République, aujourd’hui disparu. Depuis, je me suis consolé, notamment pendant la maladie de mon frère en 2013, à « la Closerie des Lilas », où me rejoint parfois ce bon Saadani, fidèle entre les fidèles, que j’ai surnommé « Larb », diminutif de larbin. « Larb » me doit tout, et notamment sa nomination à la tête du FLN. Mais il faut avouer que son zèle dépasse l’entendement. Juqu’à attaquer, bille en tête, mes ennemis du DRS, devant lesquels toute l’Algérie tremblait encore voici quelques mois.

J’espère seulement qu’il ne faudra pas sacrifier Saadani en septembre, lors d’une paix des braves avec le DRS. Heureusement, « Larb » dispose en France du soutien de quelques amis franc-maçons; ils lui ont procuré une carte de séjour en 2011 à l’époque de Claude Guéant et de Nicolas Sarkozy.  Il paraît que le général Touati, « le cerveau » de l’armée algérienne aujourd’hui conseiller à la Présidence, s’est offusqué que Saadani dispose de papiers français. En voilà un qui a la mémoire courte. Combien de gradés ont officié à la belle époque coloniale comme supplétifs de l’armée française avant de déserter dans les derniers mois qui ont précédé l’indépendance pour rejoindre l’armée de libération!. Certains ont même conservé la nationalité française, comme feu le général Belkheir, le « Régent » sous Chadli..

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Je me souviens de mon propre service militaire. C’était l’époque bénie où Abdelaziz était le ministre des Affaires étrangères et le possible dauphin de Boumedienne. Autant dire que ma période sous les drapeaux, avant un pseudo service civil, n’a duré que quarante cinq jours dans une caserne à Djelfa. Ce fut une grande colonie de vacances. Notre mère, surnommée « El Hadja », nous rendait visite et ne nous laissait pas crever de faim. On jouait de la guitare, on fumait, on partait tous dans ma voiture wolkswagen, faire des virées.

« Vivre vite »…et surtout riche, telle est depuis ma devise

 

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Ah les amateurs! Les débutants! Lorsque mon frère Abdelaziz a eu son attaque, au printemps 2013 et qu’il a été emmené d’urgence à Paris au Val de Grace, l’épisode aurait pu nous être fatal. Il suffisait que le DRS et leurs amis décrètent la vacance du pouvoir et nous étions morts. Mais le cheffaillon du DRS, Toufik, à qui ses amis conseillaient d’untervenir, est un mou, un consensuel. Moi je ne réfléchis jamais avant de cliquer sur mon smartphone. Ce goût pour la technologie, je l’ai découvert lors de mes années parisiennes. C’était l’époque du Minitel, et du minitel rose. Souvenirs, souvenirs!

Le clic, et l’horizon s’éclaircit. Lorsque, peu après l’Accident Vasculaire Cérébral (AVC) d’Abdelaziz, Toufik est parti quelques jours en Belgique se faire soigner pour des calculs rénaux, nous n’avons pas hésité, un instant, Abdelaziz et moi. Nous avons éliminé, en un clic, plusieurs de ses fidèles lieutenants, grâce à l’aide des gendarmes qui nous sont acquis. La voie est libre. Tel Macbeth, le Régent que je suis est miné par l’accession au pouvoir suprême, dès le petit matin en me rasant.

Sauf que jamais je ne pourrai tuer le frère adulé, le généreux bienfaiteur, le confident de toujours, l’absolu modèle! « Qu’un seul couteau, comme on dit chez nous, nous égorge », Abdelaziz et moi.